Chronique - H. Leconte : "J'irai parler à Tsonga avec plaisir"
Par Christophe de JERPHANION le 30/01/2015 à 07:43
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Chronique Leconte un peu particulière, ce jeudi, puisque l'ancien finaliste de Roland-Garros a tenu à répondre aux attaques de Jo-Wilfried Tsonga, dans L'Equipe de mercredi, qui s'en prenaient aux joueurs devenus consultants plutôt qu'entraîneurs et qui ne retenaient que le négatif, en oubliant le parcours des joueurs actuels et leurs réussites. Henri Leconte essaye ici de calmer le jeu et appelle au dialogue entre anciens joueurs et champions actuels pour aller dans le même sens. Et faire cesser ainsi la disette qui dure depuis 1983 pour les victoires françaises en Grand Chelem.
Henri, c'est une sorte de droit de réponse que vous voulez faire, ce jeudi après l'entretien donné par J.-W. Tsonga à L'Equipe, ce mercredi ?
Non, pas un droit de réponse. Premièrement, je pense que l'interview de Jo est assez positive. On l'a un peu titillé, un peu énervé. Par moments, il y a des choses qu'on peut dire et qui font du bien, qui peuvent faire changer les choses. Après, ce qu'il dit de nous, les commentateurs, par rapport aux coaches, je trouve ça également positif. Je ne suis pas là en train de dire "venez me voir, venez me chercher, les gars, je vais vous aider". Mais si on peut discuter et leur apporter quelque chose, c'est bien.
Je me suis retrouvé un peu dans la même situation avec Patrice Dominguez, qui était journaliste et qui est devenu mon entraîneur. J'avais fait une très bonne saison avec lui en 1986. Il faut arrêter de s'allumer dans les médias et essayer de tirer quelque chose de positif de tout ça et que nos joueurs français arrivent à passer le cap et à se retrouver en deuxième semaine
des tournois du Grand Chelem. C'est ça le plus important. Je pense que la Coupe Davis a été quelque chose de difficile à digérer pour tout le monde, même pour les joueurs, et je pense qu'on doit tirer quelque chose de positif de cette expérience.
J.-W. Tsonga regrette que vous ne vous investissiez pas assez. Mais est-ce que vous avez envie d'aider les joueurs français ?
A un moment, je n'étais pas prêt, j'avais envie d'autre chose. Aujourd'hui, je m'investis un peu plus, que ce soit dans les médias ou dans le sport. Je suis président de la section tennis de Levallois. Je suis surtout les tournois du Grand Chelem mais aujourd'hui, oui, pourquoi pas ? Si on peut donner notre coup de pouce pour les faire progresser. Peut-être que ça marchera, peut-être que ça ne marchera pas. Mais quand on voit un certain nombre d'anciens vainqueurs de Grand Chelem, ça peut marcher.
A quel niveau seriez-vous prêt à vous investir ?
Au niveau de tout, l'entraînement, la gestion du stress à un moment donné. J'ai joué une finale de Grand Chelem, je l'ai mal gérée, mais j'ai bien géré ma finale de Coupe Davis. On peut faire quelques semaines comme coach. Je l'avais proposé à la fédération il y a quelques années, ça n'avait pas été écouté.
Vous savez, on essaye tous de partir un peu du tennis parce qu'on en a marre et puis, en fin de compte, on y revient au galop, parce que c'est notre famille, c'est notre vie, parce qu'on a vécu des moments extraordinaires et qu'on a envie de les revivre autrement. Il y a des moments où ça vous démange. Alors, peut-être sommes-nous un peu maladroits, des deux côtés, parce qu'on se parle par médias interposés. Aujourd'hui, il faut tous qu'on discute et qu'on aille dans le même sens.
Y a-t-il un fossé de génération entre vous ?
Oui, il y a une distance, parce que ça va vite. Il y a les médias, les réseaux sociaux et on a du mal à communiquer. On a du mal à prendre le temps de se mettre autour d'une table pour pouvoir discuter. Et puis, il a pu y avoir, indirectement, un peu de jalousie. Il y a des joueurs qui ont de la personnalité, d'autres un peu moins, ça aussi, c'est compliqué et il va falloir tout mettre à plat. Tout ce que l'on veut, c'est qu'un Français gagne un tournoi du Grand Chelem, qu'on ait un Français en deuxième semaine, qu'on ait un Français qui fasse comme Stan Wawrinka, comme Kei Nishikori.
Est-ce que J.-W. Tsonga n'a pas l'impression que tout le monde se ligue contre lui ?
Je crois qu'on a tous vécu cela, moi le premier. Rappelez-vous 1988, j'ai bien morflé, ce jour-là. Après, j'ai bien morflé aussi à Bercy, je l'avais bien cherché, j'ai assumé. Quand on ne se sent pas bien, quand on n'est pas bien physiquement, on voit tout en noir, ce qui est normal. C'est vrai qu'on n'a pas été tendre sur la Coupe Davis, ce qui est normal aussi, parce qu'on l'a vécu et qu'on était en attente de quelque chose. Mais c'est du passé, maintenant, il faut aller vers l'avant, construire quelque chose. Si je peux aider, si Yannick Noah peut aider, si Guy Forget peut aider, si les anciens peuvent aider les jeunes, parce que c'est quand même sympa, alors, oui, on est à l'écoute.
Vous êtes agacé qu'il balance comme ça, sans venir vous voir ?
Je l'ai fait aussi, un partout, la balle au centre. Je suis quand même une grande gueule et c'est pour ça que je donne cet entretien, pas pour mettre les choses au point, mais pour que ça soit cool. C'est normal qu'on puisse réagir comme ça, avec un peu d'orgueil et c'est même positif, parce que ça veut dire qu'on l'a un peu touché et qu'il a envie de revenir. Si Jo ou Gaël peuvent réagir comme ça parce qu'on les a titillés, c'est tant mieux.
En fait, c'est comme un couple d'amoureux dans lequel personne ne veut faire le premier pas ?
Ah non, moi, je fais le premier pas. J'irai parler à Jo en rentrant, avec plaisir. On est là pour les aider, trouver des solutions. Après, s'ils ne veulent pas, ce n'est pas grave. Je ferai autre chose, je continuerai à donner des interviews un peu à chaud parce que c'est mon caractère.
Propos recueillis par la rédaction de Tennis Actu.