Roland-Garros - Nicolas Mahut : "Ce sport est dingue... !"
Par Alexandre HERCHEUX le 31/05/2019 à 10:04
Si Nicolas Mahut veut aller en deuxième semaine de Roland-Garros, il lui faudra éliminer ce vendredi un pur terrien une nouvelle fois, à savoir Leonardo Mayer. Un grand défi mais avec cette folie qui s'empare de l'Angevin, tout semble possible... ! Car Nicolas Mahut continue de surprendre sur les courts de Roland-Garros. Un match gagné en cinq sets contre Marco Cecchinato au premier tour en plus de trois heures de jeu n'a semble-t-il pas émoussé Nicolas Mahut. A 35 ans, le Français a retrouvé ses jambes de 20 ans pour peut-être sa dernière à Roland-Garros. Opposé à Philipp Kohlschreiber, Mahut s'est largement imposé 6-3, 6-3, 6-3 sur un court numéro 14 qui décidément semble avoir de bonnes vertus pour les Français.
Vidéo - Nicolas Mahut au 3e tour et sa résurrection à Roland-Garros
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Bonsoir Nicolas, félicitations pour votre victoire. Encore une fois aujourd'hui, la clé a été d'être très offensif face à cet Allemand ?
Oui, je l'avais dit après mon premier tour, c'était ma seule solution de gagner. Encore plus, à 2 set 0, quand j'ai eu un petit pépin. J'ai été encore plus offensif, encore plus relâché. C'est un court assez rapide. C'étaient les conditions parfaites, idéales pour moi aujourd'hui.
Tu avais dit, après le premier tour, que c'était ta plus belle victoire à Roland, as-tu révisé ton jugement ?
Non, je crois que cela reste ma victoire du premier tour, elle était inattendue, sur le nouveau court, il y avait une ambiance extraordinaire, aujourd'hui aussi, mais une victoire en 5 sets, étant mené 2 sets 0, ça ne m'était jamais arrivé à Roland. Mais je ne vais pas bouder mon plaisir, celle-ci est très belle aussi, elle fait partie de mes plus belles, me permet de me qualifier sur un troisième tour. De toute manière, je n'aime pas trop comparer. Je suis vraiment heureux comme ça avec cette victoire aussi. Me retrouver avec cette victoire, être au troisième tour, c'est fabuleux.
Le fait d'être relâché, cela fait qu'on joue de manière un peu différente, on se pose moins de questions ? Ça joue vraiment ?
Oui, là, très clairement, je pense que j'ai complètement lâché prise, en disant, je vais sur le court, j'essaie... Plein de fois, dans la carrière de tous les joueurs, ils essaient de dire : "J'essaie de jouer mon jeu, d’être relâché…", puis l'événement rattrape, il y a le score qui parfois ne permet pas de jouer comme on peut jouer à l'entraînement. Et là, pour une fois, ici à Roland, j'ai réussi à vraiment jouer complètement libéré. C'est une sorte de forme de lâcher-prise, en me disant : "Peut-être que ce sont les dernières cartouches, vas-y !" Et finalement, cela a payé. C'est peut-être plus difficile de le faire en début de carrière. Peut-être que là, comme je me rapproche de la fin, c'est plus facile d'y aller vraiment.
Nicolas, peut-on te comparer à Benjamin Button, à Brad Pitt, plus cela va, plus tu rajeunis. En tout cas, c'est l'impression que tu donnes sur le court.
Je te rassure, il va y avoir une limite quand même ! Il est fou ce sport, parce qu'il y a trois semaines, vraiment, je n'étais pas beau ! J'abandonne à Bordeaux, je me retire de Madrid, je me retire de Rome, j'ai hésité à aller à Lyon, je n'y suis pas allé parce que je ne me sentais pas encore prêt. Le vendredi avant les qualifications, après un entraînement, avec les coachs, j'ai dit que j’allais rendre la wild-card, parce que je ne serais jamais prêt… Et finalement, je me retrouve ici au troisième tour, 10 jours après. C'est un sport un peu dingue. Et aussi la magie de Roland-Garros, qui permet aux Français de se transcender. Quand je regardais Roland-Garros depuis tout petit, il y avait toujours un exploit d'un Français, chaque année, un Français faisait quelque chose, soit battait une grosse tête de série, soit faisait un match en 5 sets extraordinaire, et ça n'a jamais été moi. Je me suis dit, je vais faire toute ma carrière, 20 ans de Roland, sans le faire une fois… C'est finalement arrivé pour moi cette année, je suis très heureux et très fier.
As-tu déjà joué comme ça sur terre, à ce niveau et de cette façon ?
Bah non ! Je ne crois pas... Je ne crois pas, de cette façon, j'avais essayé. En 2015, l'année où je fais troisième tour contre « Le Prof »... Ça devait être 2015, ou 2016... J'avais fait deux bons matchs, un bon match aussi contre lui, j'avais perdu en 5 sets. Cela se rapprochait dans les intentions, mais là, j'étais complètement libéré ! C'est un peu nouveau.
Comment faut-il interpréter les poignets éponge sur la ligne de service ?
C'était plus un petit clin d'œil, un hommage à David Ferrer que je n'ai pas pu voir terminer sa carrière à Madrid. C'était un petit clin d'œil pour lui et, parce que je ne sais pas ce qui va se passer dans deux jours, on verra comment je récupère... C'était le moment... J'avais envie de lui rendre hommage.
J'allais te demander si c'était le genre de tournoi qui pouvait te donner envie de rempiler pour deux ou trois ans de plus, ou au contraire, c'est un signe, ça se passe si bien… Ferrer, il a fait ça parce que c'était son dernier ; est-ce à ça que tu penses maintenant ?
J'ai toujours dit, je vais clarifier s'il y a besoin, peut-être je ne m'exprime pas très bien... Je n'ai pas envie d'arrêter le simple. Si j'arrête le simple à un moment donné, c'est parce qu'au classement, je serai trop loin pour entrer dans les tournois. Mais il est sûr qu'après Roland-Garros, ma priorité sera le double, par rapport aux Jeux Olympiques. Toute ma programmation sera faite autour de ça. J'irai jouer les Masters 1000 aux Etats-Unis, avec classement simple, si je n'y entre pas, je n'irai pas jouer. Et si tu n'entres plus dans les tournois, tu ne joues plus ! Je voudrais jouer les deux le plus longtemps possible, tant que je serai joueur de tennis, je jouerai les deux. Je ferai un point après les Jeux Olympiques sur la suite de ma carrière. Tant que je peux jouer les deux, je joue les deux à fond. Le classement où je suis, 250, il n'y a plus beaucoup de tournois dans lesquels je rentre ! Par la force des choses, je serai peut-être amené à arrêter. Là, je vais reprendre quelques points, je vais peut-être pouvoir rentrer. On ne sait ce que ça va donner après le gazon... Forcément, chaque tournoi que je joue, dans ma tête, c'est une possibilité pour que ce soit le dernier. Mais si ça se passe très bien, je suis encore joueur de tennis et donc je rejouerai.
Justement, Nicolas, on voit de plus en plus de joueurs trentenaires, même quarantenaires Karlovic, qui étirent leur carrière. Pourquoi, à ton avis ? Pourquoi cette tendance se voit de plus en plus ?
Je pense que les 15 dernières années, cela a vraiment évolué. Chaque joueur a un staff étoffé. Il y a 15 ans, les joueurs voyageaient seulement avec leur entraineur physique, puis sont arrivés des kinés, des préparateurs physiques. Les joueurs sont maintenant mieux préparés, ils ont une meilleure hygiène de vie, et donc, forcément on tient plus longtemps. Il y a 15 ou 20 ans, les joueurs faisaient leur match, ils s’étiraient à peine et recommençaient le lendemain. Le corps s'usait plus vite. Il y a une meilleure hygiène, une meilleure préparation, ce qui permet aux joueurs de tenir plus longtemps.