ATP/WTA - La chronique technique par Alex' Lisiecki
Par Tennis Actu le 29/09/2014 à 09:26
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Petite nouveauté sur Tennis Actu en cette fin de saison concernant les chroniques. Après celles de Camille Pin et Henri Leconte que vous continuerez à retrouver régulièrement sur votre site, voici celle d'Alexandre Lisiecki. Pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, Alex' Lisiecki est l'actuel entraîneur de joueur luxembourgeois, Gilles MULLER, actuellement 60e au classement ATP. Il fut également par le passé Directeur Technique National à la Fédération Luxembourgeoise de tennis. Mais aussi entraîneur en Fed Cup, en Coupe Davis Cup et aux J.O de Londres. Sans oublier qu'entre 2004 et 2007, il a été coach dans la fameuse "Mouratoglou Tennis Academy" de Patrick Mouratoglou et ce, aux côtés des Françaises Fiona Gervais et Aravane Rezaï, de la Russe Anastasia Pavlyuchenkova ou encore de l'Argentin Renzo Olivo.Bref, pour sa première chronique, Alex' Lisiecki nous évoque le choix de la terre battue pour cette finale de Coupe Davis qui se tiendra fin novembre à Lille entre la France et la Suisse.
Le choix des Bleus de jouer en indoor & sur terre
Pour moi, cette finale de Coupe Davis entre la France et la Suisse, c’est comme la finale de Coupe du Monde France-Brésil 1998 : une finale de rêve. L’équipe emmenée par Arnaud Clément va jouer contre Roger Federer, 3ème mondial (il est pour certains le plus grand joueur de tous les temps) et Stan Wawrinka, 4ème mondial, vainqueur d’un grand chelem (l'Open d'Australie) cette année, et tout ça dans un stade de foot transformé en salle de tennis. C'est génial ! L’équipe de France a choisi de jouer sur terre battue indoor mais est-ce le bon choix ? Assurément oui.
D’abord, vu les contraintes techniques et d’organisation d’une rencontre de coupe Davis et le climat en France métropolitaine à cette période de l’année, jouer en indoor était une obligation. Ensuite, les deux meilleurs suisses reviendront (sauf forfait de dernière minute) du Masters de Londres la semaine précédente, et le changement de surface, du dur vers la terre battue, sera un élément désavantageux pour eux, même s’ils ont l’habitude de le faire.
En effet, les appuis à la frappe, les démarrages, les replacements ou autres glissades demandent des techniques spécifiques. Les joueurs mettent toujours un peu plus de temps à s’adapter à ce changement plutôt que le passage terre battue au dur. La technique sur terre battue sollicite beaucoup plus le bas du corps: les adducteurs et fessiers sont souvent douloureux les premiers jours du changement. Idem pour les abdominaux qui sont à surveiller au départ pour des joueurs qui jouent en général plus en rotations du tronc sur cette surface.
La terre battue est aussi un bon choix car Arnaud Clément aura plus d’options pour les simples. Par exemple, un joueur comme Richard Gasquet est plus dangereux pour lesSsuisses sur l’ocre -même indoor- que sur dur. Rappelons que Richard n’a battu R.Federer que 2 fois sur 14 rencontres, c’était il y a bien longtemps, en 2005 et 2011, mais c’était à chaque fois sur terre battue. De plus, les Suisses n’ont certainement pas un bon souvenir de leur défaite à domicile 5/0 en 2012 contre les USA… sur terre battue indoor.
"Une surface déterminante pour le résultat final ?"
Malgré tout, est-ce que la surface sera déterminante pour le résultat final ? Assurément non. Jo Tsonga et Arnaud Clément l’ont déjà dit et je suis d'accord avec eux. Autant pour la demi-finale (Ndlr : contre la République tchèque, victoire 4-1), la terre battue a largement avantagé les Français pour battre des Tchèques assez allergiques à cette surface, autant pour la finale, la forme physique, le niveau de jeu sur les trois jours, la fraîcheur mentale, et la gestion de l’événement seront des éléments plus importants à apprivoiser pour gagner. L’équipe suisse est favorite sur le papier et plus forte individuellement que celle de la France. Mais c’est la magie de la Coupe Davis: le groupe a plus d’importance que le niveau individuel.
C’est très rare au tennis de jouer en équipe pour son pays et c’est pour cela que cette compétition a tellement d’importance dans le cœur des joueurs des deux équipes. De plus, le nombre de matches de haut niveau joué au Masters et la fatigue de la fin de saison compteront dans les jambes et les têtes de l’équipe suisse, particulièrement pour Stan Wawrinka qui a gagné son 1er titre du grand chelem en janvier et qui a dû gérer de nouvelles sollicitations et attentes tout au long de l’année.
Quid du Double Suisse et Français ?
Aussi, le double suisse sera peut-être le talon d’Achille de cette équipe. La paire Federer / Wawrinka reste sur une contre-performance en ¼ de finale ave une défaite contre les Kazakhes Golubev/Nedovyesov, ce qui replace très loin leur performance en or aux J.O de 2008. Hormis ces faits passés qu’il faut relativiser, le capitaine suisse devra compter sur ses deux piliers Federer et Wawrinka, ou espérer de grandes performances de Marco Chiudinelli 162eme ATP en simple, 212ème en double ou de Michael Lammer 502ème ATP en simple et 601ème en double. Ce manque de "banc" pourrait faire une différence en fin de week-end.
De son côté, l’équipe de France est outsider mais plus équilibrée. Elle a plus d’options pour palier à un éventuel forfait ou blessure d’un joueur et plus d’options aussi pour la sélection des simples du vendredi et ceux du dimanche, et surtout pour le double qui sera encore une fois capital pour la victoire finale. Les joueurs d’Arnaud Clément vont faire une vraie préparation spécifique pour cette rencontre et certainement pour le double aussi, ce que les Suisses ne pourront pas faire. Côté français, les paires de double possible sont nombreuses et de qualités: Gasquet-Tsonga : vainqueur cette année de leurs deux doubles sur terre battue en Coupe Davis contre l’Australie et la République tchèque, Benneteau-Vasselin, vainqueurs de Roland-Garros et peut-être au Masters du double à Londres ? Ou encore Michaël Llodra associé à Tsonga (paire de double médaillée d’argent aux JO 2012) ou associé à Benneteau, comme en ¼ de finale contre l’Allemagne en avril dernier dans une rencontre qui avait si mal commencé par deux défaites en simple ?
Stan et Roger devront, s’ils veulent gagner cette rencontre, être à haut niveau trois jours de suite sur des matches qui peuvent durer et aller en cinq sets. Le tout devant un public français surchauffé en bleu, blanc, rouge ! L’équipe de France devra quant à elle battre deux très grands joueurs en simple, gagner le double et dompter des émotions folles pendant tout un week-end. Le défi sera de taille pour les deux équipes alors je suis impatient d’y être. Et vous ?