Tennis. À la découverte de - Enzo Py, gaucher d'avenir
Par Fabien MULOT le 24/04/2013 à 19:00
Enzo Py n'était pas à Monte-Carlo, la semaine dernière. Le Cannois n'a pas - encore - le classement requis pour disputer des tournois de cette catégorie. S'il n'a pas la précocité d'un Richard Gasquet, le Tricolore de 17 ans, champion de France des 13-14 ans en 2009*, n'en est pas moins un bel espoir du tennis français. Demi-finaliste d'un Future à Angers il y a dix jours (un "15000$" dans le jargon), Py, gaucher explosif au revers à une main, gravit les marches du haut niveau à son rythme. Pour Service Gagnant, il revient sur sa semaine angevine pleine de promesses et évoque la suite de sa saison, avec Roland-Garros juniors pour proche horizon.
UN GAUCHER DE 17 ANS, ANCIEN PENSIONNAIRE DE L'INSEP, 880e MONDIAL
"Depuis que j'ai commencé le circuit ATP (en juillet 2012), c'est mon meilleur résultat." Enzo Py et son léger accent du Sud sont formels : l'ancien pensionnaire de l'INSEP, qui a rejoint la Ligue Midi-Pyrénées en septembre dernier, a réalisé la plus belle performance de sa carrière à Angers, il y a dix jours. "Je suis arrivé là-bas assez confiant, à l'entraînement j'avais un niveau de jeu sympa", explique-t-il. En amont du tournoi Future, le Cannois a récité ses gammes deux semaines durant sur terre battue intérieure, histoire de réussir au mieux la transition après la saison sur dur.
Avec son coach, Cédric Raynaud, dit "Le Pélican", et Paul Cayre, autre joueur de la "génération 95", Enzo a (re)pris ses marques sur terre. Son coup droit lifté s'exprime à merveille sur une surface où il a obtenu jusque-là ses meilleurs résultats. Mis en confiance par la quinzaine, Py s'est baladé en qualifications à Angers. "J'ai affronté deux joueurs que je ne connaissais pas (le Néerlandais Rutger Cramer, puis le Français Louis-Arthur Beljean). Deux matchs faciles, qui m'ont permis de prendre mes marques sur des conditions de jeu (terre intérieure) similaires à celles de l'entraînement."
Au premier tour du grand tableau, le 1321e mondial (à l'époque) est opposé à Constant Lestienne, 20 ans et 669e au classement. "Il a fait un super début de saison (finaliste de Feucherolles en janvier, deux quarts ensuite), c'était l'homme en forme du circuit. En plus de le battre, je suis arrivé à lui mettre un "score" (6-0, 7-6(5))". Après un succès (7-6(5), 1-6, 6-3) sur Julien Demois (19 ans, 719e) - "un gaucher, donc forcément un match spécial" - Enzo doit jouer Simon Cauvard (510e) en quarts de finale.
"UN SCHÉMA NADAL-FEDERER, SAUF QUE C'ÉTAIT PY CONTRE CAUVARD"
"Quand je pars du club après ma victoire contre Julien, je vois que Quentin Halys mène 1 set 0 contre Cauvard. Finalement c'est Simon qui l'emporte. Mon coach était resté voir le match, et m'a ensuite donné deux-trois billes tactiques." Droitier, Cauvard a un revers à une main qui doit permettre à Enzo d'exploiter sa "giclette du gaucher" dans la diagonale. "C'était un schéma Nadal-Federer, sauf que c'était Py contre Cauvard (rires). Je surfais un peu sur ma vague. Plus je passais du temps sur le court, mieux j'étais."
Le score est sans appel : 6-0, 6-2. Py bat, avec la manière, son premier Top 500. "En octobre dernier, j'avais déjà fait un gros match à Rodez sur David Guez (116e mondial à son meilleur, défaite 6-4, 7-6(6))", rappelle l'intéressé. La marche sera trop haute en demi-finale, face au Belge Niels Desein (228e, tête de série numéro 2 et vainqueur du tournoi).
"SI MON OBJECTIF C'EST DE GAGNER UN FUTURE, QUE J'EN GAGNE UN, APRÈS C'EST FINI ?"
Six matchs, cinq victoires pour une défaite, une première demi-finale dans un 15 000$, un premier Top 500 à son tableau de chasse : "c'est une belle semaine, ultra positive et qui me donne confiance", avoue Py, qui brise avec fracas la barrière du Top 1000 (il est 880e cette semaine). "C'est la preuve que le travail paye. En janvier-février, je n'ai pas gagné un match. Des choses extérieures au tennis me bouffaient un peu. Mais j'ai continué à bosser dur à l'entraînement", explique-t-il avec un recul qui en dit long sur sa maturité.
Lorsqu'on l'interroge sur ses objectifs de la saison, le locataire du CREPS de la Ville rose explique : "Ce sont surtout des objectifs de travail. Si mon objectif c'est de gagner un Future, que j'en gagne un, après c'est fini ?" Difficile de lui donner tort là dessus. Py concède tout de même devoir "être de plus en plus solide en fond de court, développer aussi à outrance mon jeu vers l'avant. Je n'ai pas peur d'aller au filet."
ROLAND-GARROS JUNIORS DANS UN COIN DE SA TÊTE
Après sept jours "de récupération, d'entraînement et de cours (il est en Terminale ES)", Enzo Py était engagé cette semaine au Future de Grasse (15 000$, défaite au deuxième tour contre Jonathan Eysseric), son club depuis 5 ans. Cette fois, pas besoin de passer par les "qualifs", une wild card lui a évité ce détour toujours périlleux. Il lui en faudra probablement une autre pour disputer Roland-Garros juniors, la faute à un classement ITF (777e) peu en rapport avec son niveau de jeu actuel. "Si je l'obtiens, je jouerai pour gagner le titre. Avec ce que je fais dans les 15 000 dollars, il y a la place !"
Une ambition loin d'être aveugle, le Cannois louant les mérites de ses jeunes rivaux tricolores. "En ce moment, on est 7 Français dans le coup : Couacaud, Hamou, Hemery, Cayre et moi (nés en 95), ainsi que Pouille (94, 362e mondial) et Bourgue (94, 648e)" "On est souvent bien potes", assure-t-il. "Je le suis surtout avec Lucas (ils ont passé deux ans ensemble à l'INSEP) et Mathias (deux ans à l'INSEP et une année au pôle de Boulouris)". Py a quitté le duo "made in 94" l'été dernier, car le "fonctionnement de l'INSEP ne me correspondait pas". L'air du Sud, en revanche, paraît lui donner des ailes.
* Vous noterez le clin d'oeil - mathématique - du destin, Pi étant égal à (1)3,14. Tiens, nous sommes actuellement dans les années (201)3-(20)14... Un signe ?

Valentin Royer, de 209e à 57e en 2025 : "Si on m’avait proposé ça..."