Tennis. Match de légende - Santoro-Clément, RG 2004

Le match le plus long de toute l'histoire du tournoi parisien. Un match franco-français. Tous les ingrédients du match de légende par excellence sont réunis dans cette opposition fantastique entre Arnaud Clément et Fabrice Santoro, au premier tour de l'édition 2004 de Roland-Garros. Sous la chaleur du mois de mai du Court Suzanne-Lenglen, les deux hommes se livrent une bataille de 6h35 dont Fabrice Santoro sortira finalement vainqueur. Récit.

Un déchirement. Arnaud Clément et Fabrice Santoro face à face pour un premier tour à Roland-Garros, c'est certes l'assurance d'un grand spectacle, mais c'est aussi et surtout un déchirement pour le public français de devoir se séparer dès le premier tour d'un des meilleurs joueurs tricolores du circuit, et d'un des plus appréciés quel que soit le résultat final. Les deux hommes ne sont pas les meilleurs amis du monde malgré leur glorieux passé commun en équipe de France de Coupe Davis, mais se respectent. Dès leur entrée sur le court, les spécialistes s'accordent à dire que ce match sera long. Aucun des deux hommes ne possède un gros service ni un coup particulièrement fort. Mais de là à jouer plus de six heures...

Un début de rencontre poussif mais déjà très accroché

Le début de match est mou, décevant, comme souvent dans les affrontements franco-français malheureusement. Santoro est supérieur à Clément qui ne parvient pas à rentrer dans la rencontre, éteint par le toucher de balle du vétéran français. Fabrice Santoro empoche les deux premières manches, mais les échanges durent déjà particulièrement longtemps. Les deux hommes se connaissent par coeur et se côtoient en équipe de France depuis de nombreuses années. Mais au mental, le plus expérimenté des deux fait la différence en début de partie et remporte les deux premiers sets sans trembler (6-4, 6-3). Vexé et piqué dans son orgueil, Arnaud Clément refuse de rendre les armes et de laisser la victoire à Santoro sans se battre jusqu'au bout. La rencontre s'inverse brutalement, le match change complètement et Clément pousse Santoro à la faute après des échanges toujours très longs et parfois interminables. L'Aixois arrache la troisième manche au tie-break et relance la partie. Le soleil se couche, le ciel s'assombrit, mais les deux hommes galopent toujours, refusant de céder. Clément domine la partie mais la nuit tombe et la rencontre est interrompue dans le quatrième set. L'horloge indique déjà quatre heures de jeu.

Un cinquième set complètement fou de 30 jeux

De retour sur le Court Suzanne-Lenglen le lendemain matin, les deux joueurs ne s'attendent certainement pas à ce qui va suivre. Très souvent, ces reprises de match le lendemain tournent court, un joueur étant mieux réveillé que l'autre. Comme prévu, Clément boucle le quatrième set et la cinquième manche, que tout le monde attendait, se profile enfin à l'horizon. Sauf que ce set à lui seul va durer plus de deux heures. Dans une manche complètement folle où les deux hommes se battent pour ne pas lâcher leur mise en jeu malgré la fatigue, les breaks se font tès rares et les deux hommes poussent le spectacle au-delà du traditionnel 6-6. Au bout du bout physiquement, les deux joueurs n'ont plus la force de frapper et les échanges sont de plus en plus lents. Clément semble un petit mieux et se procure jusqu'à deux balles de match. Toutes effacées par un Santoro valeureux en défense. 14-14. Fabrice Santoro parvient enfin à breaker de nouveau son compatriote. La seconde fois dans le set. La première fois, il n'avait pu conclure sur son service derrière. La même chose semble se produire à 15-14. Santoro sert pour le match, mais se retrouve rapidement mené 0-40. Nullement abattu, le vétéran français se rebelle et efface les trois balles de break. 40A égalité : un ace ! Balle de match ! La première pour Santoro. Clément tente une montée à la volée, mais un revers de Santoro arme un magnifique passing long de ligne qui laisse Clément pantois.

Le match est enfin terminé après 6h35 de combat : 6-4, 6-3, 6-7, 3-6, 16-14. Le vainqueur tombe au sol, comme s'il avait remporté le tournoi, le public du Suzanne-Lenglen se lève, ému et admiratif. Clément, amer, quitte le court rapidement en saluant chaleureusement le public. Quant à Santoro, il s'effondre sur sa chaise et fond en larmes. La pression retombe. Epuisé, le Français reviendra sur le terrain le lendemain et sortira vainqueur d'un nouveau marathon de cinq sets face à Labadze, avant de tomber au troisième tour contre le surprenant français Olivier Mutis, tombeur cette année-là d'Andy Roddick. L'histoire et la légende sont écrites. Pour bien des années encore.

Revivez en images le 30ème et dernier jeu de la cinquième manche entre Fabrice Santoro et Arnaud Clément