Tennis. Roland-Garros - Philippe Doucet : "Alcaraz ... dans la même lignée que Federer"
Il est de retour sur Tennis Actu pour vous livrer ses anecdotes. Philippe DOUCET dit "La palette" ! Vous connaissez forcément. Le consultant foot de Canal +. Né le 16 août 1962, Philippe DOUCET est aussi et aujourd'hui gérant de son entreprise "La Palette a Doudouce" et cette année, en balade tous les jours à Roland Garros, Philippe Doucet nous raconte une anecdote par jour… et c'est sur Tennis Actu.
Vidéo - Carlos Alcaraz au troisième tour de Roland-Garros
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Avez-vous noté que Carlos Alcaraz a totalement changé son jeu sur terre battue ? Après tout, c’est plutôt étonnant pour un petit gars qui venait juste d’aligner, sur cette surface, Roland-Garros 2024, finale des J.O et victoire à Monte-Carlo ! Pour ceux qui l’ont suivi lors de ce tournoi en Principauté, on sentait néanmoins poindre une certaine insatisfaction chez Carlos Alcaraz. Quand bien même le petit génie espagnol s’était finalement sorti des griffes de Fils ou Musetti pour finir.
"C’est donc à Barcelone, en plein milieu du tournoi, que s’est opéré un changement de fond dans son jeu..."
C’est donc à Barcelone, en plein milieu du tournoi, que s’est opéré un changement de fond dans son jeu. Bon, j’avoue que je le survends un chouïa : Alcaraz joue toujours de la main droite et son revers à deux mains est intangible ! Mais, tout de même, avancer de trois mètres au retour n’est absolument pas un changement anodin. Et rentrer carrément dans le court sur la deuxième balle adverse encore moins. Voilà Alcaraz sur les traces de Roger Federer. Pour mon plus grand plaisir.
"Je n’avais pas compris le match d’Alcaraz en finale des JO contre Novak Djokovic"
Pour tout dire, je n’avais pas compris le match d’Alcaraz en finale des J.O contre Novak Djokovic. Après avoir éparpillé le Serbe à Wimbledon, pourquoi donc avait-il autant défendu pour son retour à Roland-Garros ? Comment un joueur capable de prendre la balle très tôt et frapper fort d’emblée au point de désorganiser totalement un maître sur gazon comme Djoko avait-il pu prendre une option aussi inverse quelques jours plus tard sur terre battue ? Et perdre au passage une belle médaille d’Or à Paris…
Certes, tout peut se comprendre. Après tout, le Murcien avait gagné Roland deux mois avant en retournant dans les bâches sur l’immense Central. Pourquoi donc aurait-il dérogé à cette méthode brevetée Rafa Nadal à son retour à Paris ? Mais l’expliquer est une chose. L’absence de réaction en est une autre. En jouant aussi derrière dès l’entame du point avait permis à Djokovic de prendre l’initiative dès le début de l’échange. Après un set perdu en subissant ainsi, toujours pas de réaction. Certes, Alcaraz a la puissance nécessaire pour jouer aussi loin de sa ligne. Et une faculté défensive exceptionnelle. Il l’a prouvé en gagnant ainsi sur terre. Mais Nadal n’hésitait pas sur la stratégie et poussait le vice jusqu’à envoyer en retour de véritables lobs puissants pour avoir le temps de se rapprocher de sa ligne de fond. Alcaraz est moins discipliné, plus créatif. Avec des trajectoires moins hautes en retour, il avait laissé la possibilité à Djokovic de s’engouffrer dans la faille et d’entrer dans le terrain.
Les deux tie-breaks avaient, comme souvent, donné l’avantage à l’attaquant. Et, ce jour-là, il se nommait Djokovic ! Est-ce que ce match était resté dans l’esprit du joueur et de son staff ? Apparemment, non. Puisque Alcaraz a recommencé sa saison 2025 sur terre comme il avait fini sa finale olympique, en retournant dans les bâches. Et il a gagné ainsi à Monte-Carlo. Est-ce la dimension inférieure du terrain à Barcelone qui l’a fait réfléchir ? Ou la perspective de rejouer Fils et Musetti contre lesquels il avait trop souffert une semaine avant ? Toujours est-il que voilà Alcaraz se rapprochant de sa ligne au retour. Et, à mon sens, cela change tout le jeu. Bien sûr, il peut éventuellement concéder plus d’aces ou de services gagnants. Rater plus de retours aussi. Mais quand il se mue en relanceur express, il déstabilise bien plus l’adversaire. Les points durent moins longtemps. Et, surtout, il semble avoir retrouvé un plaisir espiègle de jouer en ayant opéré ce choix de fond.
"Alcaraz est dans la même lignée que Federer"
Car le tennis n’est pas le sport le plus fun de la planète ! Il suppose une discipline et une force de répétition qui n’use pas seulement l’adversaire. Or, le plaisir semble être un ingrédient essentiel pour Carlos Alcaraz. Roger Federer l’avait retrouvé à 36 ans, après sa blessure en 2017. En jouant des demi-volées de revers à toute bombe et en osant se livrer totalement à l’attaque. Alcaraz est dans la même lignée. Il y a quelques années, un ami me connaissant bien et encore mieux le tennis, m’avait annoncé le désastre à venir : le nouveau Nadal espagnol arrivait, il avait 15 ans et se nommait Alcaraz ! Quelle erreur ! Car j’ai immédiatement pris plaisir à le voir jouer. Sa créativité et sa spontanéité sont un bonheur dans un sport où le stéréotype guette rapidement !
Alors imaginez ma joie de le voir adopter un jeu qui le rapproche encore des joueurs qui avancent dans le terrain, comme le faisait si élégamment Roger Federer. A Rome, Alcaraz a poussé l’expérience durant tout le tournoi. Et sans sourciller face à de gros serveurs comme Draper ou Sinner. Et, ici à Roland-Garros, face au dangereux Hongrois Maroszan, Alcaraz aurait pu douter après la perte du deuxième set. Sauf qu’il avait des balles de break dans chaque jeu de service adverse. La sanction tomba dans les deux derniers sets. A sens unique !
En tout cas, cette variation tactique importante prouve que Carlos Alcaraz n’est pas le dilettante décrit dans le dernier documentaire sur lui. Il a forcément travaillé fort en retour pour être ainsi capable d’avancer. Même s’il avait ça en lui, l’ayant abondamment prouvé en gagnant deux Wimbledon. En tout cas, ce spectacle réjouissant m’a donné envie de suivre tous ses matches lors de ce Roland-Garros. J’ai hâte d’aller voir son prochain match contre l’original Dzumhur. Et vous ?