Tennis. ITW - Mehdi Darlis : "Over The Net, la réalité du tennis"
Par Clémence LACOUR le 21/06/2016 à 22:07
Vidéo - "Over The Net" : le teaser du documentaire choc
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L'annonce de la diffusion du film Over The Net : rêve ou illusion, avait fait couler de l'encre et quelques gouttes de sueurs froides chez certains futurs spectateurs qui se demandaient si l'auteur, Mehdi Darlis, allait casser le rêve et les ambitions suscités par le tennis, sport ultra médiatisé, qui rapporte tant d'argent aux meilleurs mondiaux, et si peu à ceux qui sont hors du top 100. Sans accuser ni blâmer quiconque, le réalisateur a voulu montrer la réalité de la vie de ces joueurs qui, n'étant pas assez bons, ne pourront jamais tremper leurs lèvres dans l'ivresse des grands rendez-vous que sont Wimbledon, Roland-Garros, l'US Open ou l'Open d'Australie, mais sans avoir non plus d'autre porte de sortie. Comment faire des ces châteaux en Espagne quelque chose de tangible, comment sortir du mirage pour créer un autre horizon ? Là, comme qui disait, est la question. Tennis Actu a eu la chance de rencontrer Mehdi Darlis à l'issue de la projection de son film au Mas de la Madone à Nîmes et d'évoquer son documentaire, mais également les liens - difficiles en France - entre le sport de haut niveau et l'éducation.
Il semblerait que certaines personnes ne voulaient pas tellement qu'Over the net soit vu, voire existe, pourquoi ?
Je pense que c'est à cver theause du teaser du documentaire. Ils ne savaient pas de quoi j'allais parler. Ils n'étaient peut-être pas tant inquiets mais plutôt intrigués par la tournure qu'allait prendre le film, quelle était ma démarche. Quand, au final, ils se sont rendus compte que je ne pointais du doigt absolument personne, que je cherchais juste à montrer une réalité, sans accuser personne, cela s'est bien passé. Dans le teaser, il y a Jo-Wilfried Tsonga qui dit : « soit t'as de l'argent, soit t'es fort, soit t'arrêtes. » Les gens étaient vraiment intrigués. Quand ils ont compris ma démarche, que j'ai commencé à faire des rendez-vous, à expliquer, ils m'ont ouvert les portes et je n'ai pas eu de problèmes, au final. Même si cela m'a pris un peu de temps.
On peut constater dans le système français, une difficulté à combiner la vie de jeune sportif de haut niveau, et le désir de faire des études. Pour votre part, vous avez fini par choisir de partir en Université américaine, est-ce une difficulté que vous avez vécue ?
Oui. Moi, j'étais au CNED depuis la 2nde, donc je n'ai pas été à l'école ni en seconde ni en première, juste en Terminale pour mon bac, car je n'avais juste pas le choix. Il fallait que je m'entraîne 6 heures par jour, je ne pouvais pas suivre un circuit régulier, comme il se passe en France. Peut-être qu'en France, malheureusement, on ne se rend pas compte de la richesse que peut apporter le sport de haut niveau. Ce qu'ils peuvent apporter à la société. Aux Etats-Unis, il y a de nombreuses entreprises qui recherchent des athlètes de haut niveau, parce qu'ils savent qu'ils ont des capacités en Management, par exemple. Des capacités à gérer la pression, aussi. Ils développent pas mal d'aspects grâce à leur passé de sportifs. En France, ce n'est pas mis encore assez mis en valeur.
N'est-ce pas parce qu'en France, d'une certaine façon, on a trop tendance à cloisonner les choses, le sport contre les intellectuels, le pôle scientifique contre le pôle littéraire, ce qui fait qu'il est plus compliqué de passer de l'un à l'autre?
Le truc aux Etats-Unis, c'est que quand ils voient une opportunité, c'est-à-dire un talent quelconque, ils essayent de capitaliser dessus, pas forcément pour en faire de l'argent, mais pour en faire quelque chose, pour créer quelque chose. Quand j'étais en Floride, j'ai demandé « Mais, est-ce que vous n'êtes pas, quelque part, des vendeurs de rêves ? ». Il m'a répondu : « Oui, bien sûr. Mais mon ambition, c'est de faire des citoyens du monde. Quand ils arrivent dans mon académie, ces jeunes, s'ils ne réussissent pas au tennis, je veux qu'ils soient les meilleurs chirurgiens du monde, les meilleurs acteurs de la planète, les professeurs universitaires, de la planète. » Il n'y a pas que l'aspect sportif. Au final, c'est une école comme une autre. Juste, c'est une école de sportifs de haut niveau, une académie de tennis. Mais ils ont des cours, ils ont des profs, alors qu'en France, très tôt, ils divisent les deux. Je ne porte aucun jugement, vraiment, mais je pense que ça serait intéressant de réussir à marier les deux, et qu'on puisse avoir des sportifs de haut niveau qui, quand ils parlent à la télé ou à la presse, ils inspirent les jeunes, comme Mohamed Ali. Je n'ai pas l'impression que ça existe en France, alors qu'on pourrait créer des choses autour de gens comme ça, avec des gens qui pourraient partager leur expérience avec de l'intellect, aussi.
Propos recueillis pour Tennis Actu au Mas de la Madone, à Nîmes, par Clémence Lacour
