Tennis. Roland-Garros - Marc Maury : " Wawrinka et Federer... à leur heure !"

En ce début juin, il règne - crise sanitaire oblige - une atmosphère bizarre autour du stade Roland-Garros. Une impression de vide absolu. Habituellement, le quartier est bouclé, l'effervescence est palpable, les vrais amateurs de tennis sont au bord des courts. L'édition 2020 des Internationaux de France devait se dérouler du 24 mai au 7 juin sous le soleil parisien. Pour tenter de combler ce vide, Tennis Actu décide de regarder "Dans le rétro de Marc Maury" pour vous présenter durant la quinzaine un évènement qui a marqué l'histoire du Grand Chelem français. Pour cette quinzième chronique de la série "Roland-Garros - Dans le Rétro de Marc Maury", célébrons les titres de Roger Federer et de Stanislas Wawrinka. Les deux Suisses ont tous deux connu le Graal un 7 Juin Porte d’Auteuil. 

Vidéo - Roland-Garros - Dans le rétro de Marc Maury !

Depuis 22 ans et le passage professionnel de Roger Federer, la Suisse, pays moins de 9 millions d’habitants, est devenue une référence dans le monde du tennis. Dans l’ombre du génie Bâlois, Stan Wawrinka a attendu son tour et a su prendre la relève quand Roger était dans une période plus compliquée. Ils ont tous deux triomphé sur le court Philippe Chatrier dans des contextes très différents. Les deux helvètes aux styles uniques ont aussi su conquérir le cœur de l’exigeant public Français.

7 Juin 2015, quand Wawrinka devient Stanimal

Ne réduisons pas la grandiose victoire de Stanislas Wawrinka Porte d’Auteuil à un simple short à carreaux, mais force est de constater qu’il restera le symbole d’une quinzaine défrisante du Lausannois.

Wawrinka est un joueur qui a longtemps été dans l’ombre de son ami Federer. Sur le circuit depuis 2002, il n’a jamais été aussi bon qu’à ses 30 ans, lors de cette quinzaine à Roland-Garros où il a assommé chacun de ses adversaires avec une puissance et une confiance en lui hors norme. Rarement un revers à une main n’a eu une telle efficacité que lors de ce tournoi. Stan avait remporté en 2014 son premier titre du Grand Chelem en Australie face à Rafael Nadal. Il devenait le deuxième joueur à remporter un Grand Chelem dans l’ère du Big 4. En 2015, il arrive à Paris avec 2 titres en poche (Pune et Rotterdam) et des défaites face à Federer, Dimitrov et Delbonis sur terre-battue malgré une victoire face à Rafa à Rome, l’Espagnol connaissant une période très compliquée depuis sa blessure fin 2014. Stan Wawrinka arrive donc sans trop de certitudes à Roland-Garros…

Au premier tour, il domine logiquement le joueur Marsel Ilhan en trois manches. Il laisse un set à Dusan Lajovic au deuxième tour dans un duel de revers à une main mais rejoint Steve Johnson au troisième tour. Le niveau du Suisse monte d’un cran, il ne laisse aucune chance à l’Américain qui ne se crée aucune balle de break du match. En huitième de finale, il joue l’un des cinq Français encore en lice, Gilles Simon. Dépassé par l’agressivité de Wawrinka, le Niçois passe à la trappe en 1h52 sur le Suzanne Lenglen. On se demande alors ce qui peut arrêter le Suisse dans ces Internationaux de France… Peut-être un autre Suisse car il affronte Roger Federer dans un match déterminant pour la suite du tournoi. Stan n’a battu Roger qu’à deux reprises en 18 rencontres. Mais ce jour-là, il n’y avait rien à faire, Stan était un cran, voire deux au-dessus de son compatriote. Difficile de trouver des faiblesses à Stan qui joue à un niveau stratosphérique pendant tout le match et qui élève son niveau dans les moments chauds. Il passe en trois manches. On se met à penser qu’il peut le faire, dans une quinzaine si singulière.

En effet, coup de tonnerre, Novak Djokovic a vaincu le maître des lieux Rafael Nadal en trois manches. Encore une fois, quand le taureau de Manacor est sorti, les joueurs encore en lice se mettent à y croire. Dans le dernier carré, c’est Jo-Wilfried Tsonga qui s’est promis de barrer la route à Wawrinka pour réaliser son rêve et gagner à domicile. C’est raté pour le Manceau qui sort avec les honneurs après avoir fait trembler le Lausannois pendant 3h46 sur le Philippe Chatrier. Le Suisse a fait preuve d’un mental d’acier en sauvant 16 des 17 balles de matchs que s’était procuré le Tricolore, une statistique impériale. En finale, c’est Djokovicqui veut reproduire l’exploit de Federer six ans auparavant. Le Serbe est affamé de cette victoire dans le seul Grand Chelem qui lui résiste. On en oublierait presque que son opposant est tout aussi motivé et a surclassé trois joueurs du Top 15 pour se hisser en finale de majeur pour la seconde fois. Ce 7 Juin 2015, les deux hommes livrèrent l’une des plus belles finales jouées à Roland-Garros depuis l'ère Nadal. Après la perte du premier set six jeux à quatre, Wawrinka est devenu Stanimal. Il n’avait plus aucune faiblesse, chaque balle frappée par le Suisse était un potentiel coup gagnant. Djokovic n’avait plus aucune solution face à un tel niveau de maîtrise. Il ne pouvait que constater que ce 7 Juin, Stanislas Wawrinka était touché par la grâce. Ce dernier l’emporte en 3h13 sur le score de 4-6 6-4 6-3 6-4 sur un dernier revers gagnant. Il se retourne vers son clan pour vérifier que tout cela est bien réel et jette sa raquette dans les airs, en guise de signature d’une copie parfaite rédigée tout au long de la quinzaine.

7 Juin 2009, la consécration pour Federer…

Il est 17h08 quand Roger Federer s’apprête à frapper l’un des services les plus important de sa carrière. Tous les regards sont rivés sur lui depuis maintenant une semaine et l’élimination de Nadal par son opposant du jour, Robin Söderling. Il est 17h08 et Federer s’apprête remporter le seul Grand Chelem qui lui manque malgré son aisance indiscutable sur cette terre-battue redoutée par les attaquants dans son style. Mais Federer est bien plus que cela, au bout de ce service il peut rejoindre son idole Pete Sampras au nombre si symbolique de majeurs remportés, et cela à seulement 28 ans… Sous le regard de 3,7 millions de téléspectateurs en France, Roger sert sur le T et le retour s’envole en dehors des limites. Il l’a fait, ce 7 Juin 2009, le maestro marque un peu plus le tennis de son empreinte. Une quinzaine historique s’achève…

La France est un pays spécial pour Federer. Il a remporté son premier titre professionnel au Challenger de Brest avant de disputer son premier match en Grand Chelem à Paris en 1999. Pourtant le French Open reste le chaînon manquant à l’incroyable carrière du joueur de 28 ans. Un joueur Espagnol d’une précocité affolante sème la terreur sur l’ocre Parisien depuis maintenant quatre ans. Cela fait quatre ans que Roger ne parvient pas à le battre, et trois ans de suite que le Suisse s’incline en finale. L’avantage psychologique de Nadal sur Federer est monté d’un cran en 2008, le Suisse, ultra dominant sur le circuit depuis 2004, se fait corriger sur le central 6-1 6-3 6-0. En 2009, Nadal a raflé Monte-Carlo, Barcelone et Rome avant de s’incliner en finale de Madrid face à Federer.

Le destin du Maestro vire de bord...

Pour son premier tour, Roger balaye le terrien Alberto Martín en trois manches. Il domine ensuite l'Argentin Acasuso en quatre manches disputées. Au troisième tour, il affronte Paul-Henri Mathieu, le Français n’a pas perdu une manche depuis le début du tournoi. Il crée d'ailleurs la surprise en remportant la première manche face à un Federer en plein doute. L’helvète parvient à se reprendre et à dominer le Français en quatre manches, à l’expérience. Puis le destin du Maestro vire de bord. Rafael Nadal subit sa première défaite à Roland-Garros face à Robin Sörderling. Tous les regards se tournent alors vers Federer, c’est l’année ou jamais pour soulever la coupe des mousquetaires. Pourtant, le rêve a failli tourner court dès le lendemain, en huitièmes de finale face à Tommy Haas, Roger ne surmonte pas la montagne de pression qui repose sur ses épaules et cède face à un adversaire qu’il doit dominer. Il est mené 7-6 7-5 4-3 et doit sauver une balle de break. C’était en fait celui-ci, le service le plus crucial de sa carrière. Une inspiration en coup droit plus tard, Roger avait fait tourner le match. Il racontera plus tard : « Honnêtement, dès que j’ai sauvé cette balle de break à 4-3 dans le troisième, je me suis dit : voilà c’est fait, je vais renverser la vapeur ».

Il domine de la tête et les épaules le reste du match, il ne reste plus que trois matchs avant la consécration. Sur sa lancée, il surclasse l’espoir Français Gaël Monfils en trois manches pour se retrouver dans le dernier carré. La tour de Tandil se dresse alors face à lui, Del Potro est impressionnant depuis le début de la quinzaine. Il paraît meilleur que l’helvète et le confirme en menant deux manches à une. Mais plein de ressources, Federer renverse une nouvelle fois la situation et au bout de la cinquième manche il exulte, il jouera la finale de Roland-Garros, face à la tête de série 23 du tournoi, Robin Söderling. La suite on la connaît, Federer joue cette finale avec une décontraction ahurissante et devient le 2^ème joueur de l’ère Open (après André Agassi) à remporter les quatre tournois du Grand Chelem.