Tennis. Roland-Garros - Philippe Doucet : "Alors, Djokovic ou Boisson ? Loïs ou Novak ?"
Il est de retour sur Tennis Actu pour vous livrer ses chroniques. Philippe DOUCET dit "La palette" ! Vous connaissez forcément. Le consultant foot de Canal +. Né le 16 août 1962, Philippe DOUCET est aussi et aujourd'hui gérant de son entreprise "La Palette a Doudouce" et cette année, en balade tous les jours à Roland Garros, Philippe Doucet nous raconte une anecdote par jour… et c'est sur Tennis Actu.
Vidéo - Loïs Boisson est en demies de son premier Grand Chelem !
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La « story » de Loïs Boisson...
Alors, Djokovic ou Boisson ? Loïs ou Novak ? Pas aisé de choisir entre les deux performances qui ont marqué cette journée d’hier (mercredi 4 juin). Evidemment, la « story » de Loïs Boisson est proprement ahurissante et unique avec une nouvelle victoire sur la numéro 6 mondiale, Mirra Andreeva. Mais le retour de Novak Djokovic qui sort Alexander Zverev (numéro 3 mondial), juste au bon moment après une saison sur terre à oublier, ne manque pas de charme non plus.
Au final, vous m’avez convaincu : pas de choix mortifère et on évoquera même les points communs entre les deux performances du jour. Bien sûr, les deux vainqueurs n’ont pas un jeu comparable. D’ailleurs, vous avez sans doute vu passer le chiffre invraisemblable de Boisson qui fait tourner la balle plus vite (plus de 3000 tours/minute) que Novak Djokovic…
Ce qui indique que la Française use de son coup droit lifté sans modération et avec une puissance que le vétéran serbe (38 ans) ne peut plus imprimer. Du coup, les deux joueurs ont employé des méthodes bien différentes pour éteindre leurs adversaires du jour.
La Française usa donc fortement de son lift de coup droit pour peser et accélérer. Mais aussi d’un revers bien meilleur qu’on le dit. Surtout, l’usage du revers coupé est devenu rare en tennis féminin. Et cela contribue donc largement à varier le jeu et le rythme, ce à quoi les premières mondiales ne sont guère habituées.
Côté serbe, c’est l’amorti qui fut l’arme primordiale. Il ne vous semblait pas que le toucher de balle était le point fort de l’ancien numéro un mondial ? Exact. Mais face à un adversaire qui aime plus que tout jouer très fort en rythme, éloigné de sa ligne de fond, l’amorti s’est révélé être un atout majeur pour Djokovic.
361e mondiale et invitée à Roland-Garros, Loïs Boisson est en demi-finales… et elle n’a jamais caché ses ambitions ?
— TennisActu (@TennisActu) June 4, 2025
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Pour nos deux héros...
Reconnaissons que tout ne se passa pas si bien au départ pour nos deux héros. Un zeste de nervosité pour Boisson et deux breaks concédés au long d’une première manche spectaculaire. Si la Française essayait de faire le jeu, les contres d’une Andreeva solide, faisait mal. Curieusement, c’est pourtant la Russe qui s’emmêla tactiquement. Alors qu’elle avait souvent contré la Française en allant la chercher sur son point fort, le coup droit, elle commença à jouer petit bras sur le supposé point faible de son adversaire. Sauf que Boisson sut alors user d’un chop très bas pour éteindre le feu russe. Avant de profiter de ces échanges peu rapides, pour la planter en se décalant avec son coup droit. Si vous y ajoutez un coup droit en voie d’extinction côté russe, Andreeva perdait tout son avantage (et même une balle de set) et lâchait le set au comble de la nervosité.
Côté Djoko, le match n’atteignit jamais ces sommets. Une entame bien mollassonne entraînait même la perte logique de la première manche. Zverev n’impressionnait pas, mais imposait un rythme relativement élevé avec un minimum de fautes. Suffisant pour dominer un Djokovic qui, après tout, n’avait plus trop l’habitude de jouer les gros du circuit à ce rythme élevé.
Avec une qualité de déplacement moyenne, le recordman des Grands Chelems remportés laissait même penser que Zverev pourrait l’éteindre en appuyant un peu plus. Se voyant incapable de gagner les longs rallyes comme autrefois, ou d’accélérer, Djokovic changea de stratégie. Il entama une campagne d’amortis, profitant du peu d’intensité que mettait Zverev dans la balle et de sa position très reculée.
L’allemand aime frapper fort, mais à vitesse constante. Un métronome. Une fois en rythme, Djokovic commença à le contraindre à venir joueur autour du filet, où sa « main » n’a vraiment rien d’un podium mondial. La tactique idéale pour agacer un adversaire. De fait, Zverev perdit le fil. Il essaya bien de frapper plus fort au début du troisième. Ce fut pire que tout, enchaînant les fautes et les mauvais choix lorsqu’il s’agit d’aller vers l’avant. Sacha avait perdu tout rythme…
De sorte que ce match ne prit que rarement de l’amplitude. Avec un plan de jeu novateur (pour lui), mais nécessaire, Djokovic l’emporta presque facilement. Pour dire vrai, et vous surprendre, le jeu avait été plus spectaculaire lors du match des jeunes femmes l’après-midi. Mirra Andreeva, du haut de ses 18 ans, avait réagi fortement en début de deuxième manche.
A nouveau, elle allait chercher la Française sur son coup droit pour mieux la surprendre et ensuite finir côté revers. Avait-elle compris sa méprise de la fin du premier set et trouvé un plan de jeu cohérent et continu ? Elle mena bien 3-0, mais la suite montra le contraire. Même si elle n’affiche pas la même indolence que Zverev, Andreeva sombra à l’image de son coup droit désastreux lors des six jeux suivants perdus en un clin d’œil… Comme Zverev, l’absence d’un plan de jeu établi fut un handicap rédhibitoire.
Car si on parle beaucoup du grand coup droit de Boisson, il ne faut surtout pas oublier son intelligence de jeu et ses variations permanentes. De quoi irriter au plus haut point la jeune Russe qui perdit le fil du match. Celui que Zverev ne trouva que par intermittence plus tard lors du match de la soirée.
La magnifique réponse de Jannik Sinner, interrogé sur Loïs Boisson après leurs qualifications en demi-finales.????
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Si Djokovic ne risque plus d’attraper le tournis...
Finalement, cette journée de tennis bien remplie n’a surpris que ceux qui raisonne en termes de vitesse et de lourdeur de frappe. A ce jeu, Zverev et Andreeva auraient dû prendre l’avantage. Mais le tennis est aussi un jeu d’intelligence et Djokovic comme Boisson ont su user de variations et d’un plan de jeu établi. Une arme essentielle en tennis.
Ca tombe bien car ils auront tous deux à nouveau besoin de sens tactique lors de leurs demi-finales respectives. Contre Sinner, le Serbe devra encore décourager le numéro 1 mondial d’imposer sa cadence infernale. Là encore, il faudra user d’amortis, de revers coupés et de changements de rythme pour perturber l’Italien, qui n’aime guère cela comme Moutet a pu le montrer durant un set l’an passé. Néanmoins, il sera infiniment plus coriace que Zverev, qui a toutes les qualités, sauf celle de les rassembler pour battre les meilleurs.
Idem pour la Française si elle veut continuer et écrire la plus belle performance de l’histoire du tennis. Face à Coco Gauff, elle va faire le jeu et peut largement perturber l’Américaine. Toutefois, c’est encore la variation des effets et des attaques qui a une chance de perturber la défense de Gauff, la numéro 2 mondiale. A la Française de garder la même fraîcheur et insouciance.
Si Djokovic ne risque plus d’attraper le tournis devant de telles altitudes, Boisson est dans un autre monde. Le Serbe ne joue plus vraiment pour le classement, mais une victoire de plus en Grand Chelem. Pendant ce temps, Boisson est déjà passée de la 361e place avant le tournoi à la 65e place environ…en attendant demain et cette demi-finale. En jeu, une place en finale pour son tout premier tournoi Grand-Chelem. On croit rêver…
