Tennis. Roland-Garros - Philippe Doucet : "Aryna Sabalenka... les montagnes biélorusses !"
Il est de retour sur Tennis Actu pour vous livrer ses chroniques. Philippe DOUCET dit "La palette" ! Vous connaissez forcément. Le consultant foot de Canal +. Né le 16 août 1962, Philippe DOUCET est aussi et aujourd'hui gérant de son entreprise "La Palette a Doudouce" et cette année, en balade tous les jours à Roland Garros, Philippe Doucet nous raconte une anecdote par jour… et c'est sur Tennis Actu.
Vidéo - Aryna Sabalenka, battue en finale de Roland-Garros
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"Entre ceux qui jugent que c’est la meilleure finale de la décennie et Aryna Sabalenka qui s’excuse auprès du public d’avoir fait un match aussi horrible..."
Pas facile de faire la part des choses après l’incroyable finale du tournoi féminin. Entre ceux qui jugent que c’est la meilleure finale de la décennie et Aryna Sabalenka qui s’excuse auprès du public d’avoir fait un match aussi horrible, il y a forcément de la place pour pas mal d’avis. Evidemment, dans ce cas, personne n’a tort. Cette finale a été passionnante de bout en bout avec des rebondissements spectaculaires. Le premier set a duré 1h20 et nous a offert tous les vertiges. Menant 4-1 40/0 sur son service, la numéro 1 mondiale Aryna Sabalenka semblait d’abord survoler son sujet. Après tout, elle est numéro 1 et a battu Coco Gauff nettement en finale à Madrid. Du coup, si la terre-battue semblait sa surface faible jusqu’ici, sa victoire en demi sur la triple tenante du titre Iga Swiatek semblait lui avoir ouvert la route du succès.
"On voit encore une fois Sabalenka s’enfermer dans un psychodrame interne qui semble petit à petit la broyer"
Mais voilà que l’Américaine remonte jusqu’à servir pour le set à 5-4 et à 6-5, et mener encore 5-3 au tie-break. Le temps de se souvenir qu’elle avait gagné le tournoi junior et toujours bien figuré à Roland-Garros (dont une finale en 2022), voilà Sabalenka qui reprend le jeu et remporte ce premier set au bout du suspense. On parle alors de logique tant la Biélorusse donne le tempo de ce match. Les temps forts correspondent avant tout à ses états d’âme. Et elle fait le score avec sa puissance et ses points gagnants…mais aussi avec ses nombreuses fautes. Cela n’enlève rien au mérite de Coco Gauff qui, comme toujours, s’accroche et se bat sur toutes les balles. Et parvient même à contrer plus souvent Sabalenka, surtout avec son revers. Malgré un service et un coup droit minimalistes, on se dit que rien n’est perdu pour Gauff quand on voit l’état de nerfs de la Biélorusse. Bien que largement numéro 1 mondiale et rendu à sa 6e finale de Grand Chelem, on voit encore une fois Sabalenka s’enfermer dans un psychodrame interne qui semble petit à petit la broyer. De fait, le rythme des fautes s’intensifie jusqu’à offrir le deuxième set et un break d’avance à Gauff dans le troisième.
"Sabalenka a commis en tout 70 fautes, soit 40 de plus que Gauff"
Sabalenka a commis en tout 70 fautes, soit 40 de plus que Gauff ! Bien sûr, elle a réussi plus de points gagnants que l’Américaine, mais largement compensés par le monceau de fautes commises à cause d’une nervosité croissante. En ce sens, on peut parfaitement comprendre la réaction de Sabalenka qui parlera de « blague » en salle de presse. Et si la finale a été extraordinaire d’intensité et de suspense, voire aussi une opposition de style qui plaît, c’est aussi l’incroyable nervosité de Sabalenka qui a permis ce scénario, mais aussi quelques points ultra spectaculaires tant Gauff a défendu jusqu’à l’excellence sur les mauvais choix de la Biélorusse.
"Cette finale a subi l’effet des « montagnes biélorusses » empruntées par Sabalenka"
Bref, cette finale a subi l’effet des « montagnes biélorusses » empruntées par Sabalenka. Mais pour son plus grand bien tant les surprises et le suspense grandissaient. La fin de match aurait même pu être encore plus épique avec une Gauff jusqu’ici tout en maîtrise de ses nerfs, mais rattrapée par la peur de gagner. Servant à 135 km/h en première balle et ne dépassant plus le carré de service avec son coup droit, il a fallu l’aide salvatrice de Sabalenka pour pouvoir achever cette finale. En tout cas, que l’on soit pour la thèse de la finale de ce début de siècle ou celle de Sabalenka, nul doute que cette finale a plaidé pour le tennis féminin. Et contre Patrick Mouratoglou quand il affirmait que « Le problème du tennis féminin, c’est qu’il n’y a pas de star ! ». De fait, il a lui-même entamé un mea culpa après la finale en avouant qu’il avait oublié Coco Gauff…
De fait, l’Américaine est une star. Et sa nationalité y fait beaucoup. Annoncée comme la successeur de Serena Williams lorsqu’elle arriva en 1/8e à Wimbledon à 15 ans, elle a mis du temps à justifier cette assertion plutôt dure à justifier. Mais elle a déjà gagné un US Open (contre…Sabalenka) et est la première américaine à l’emporter sur ocre depuis Serena en 2015 ! De plus, ses positions tranchées sur le « Black Lives Matter » en ont fait une des rares personnalités influentes du tennis mondial. Dans la foulée d’une grand-mère déjà connue pour ses positions contre la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Si son jeu aura du mal à déplacer les foules (même si elle est numéro 2 mondial et différente des autres top 10), sa personnalité peut faire grand bien au tennis féminin dans un avenir proche.
"La caricature de la championne venue des pays de l’est qui ne maîtrise pas ses nerfs"
A l’inverse, Aryna Sabalenka est, malheureusement, la caricature de la championne venue des pays de l’Est qui ne maîtrise pas ses nerfs. Malgré une personnalité extravertie, elle ne parvient pas à drainer les foules derrière elle. Et n’a encore remporté que trois Grand-Chelems, tous sur dur. Surtout, elle vient de saboter deux finales de Grand-Chelem cette année en perdant contre Madison Keys à Melbourne et Coco Gauff à Paris. Deux finales lâchées de justesse. Mais qu’elle aurait sûrement pu largement mieux négocier. A défaut d’être une star, elle serait au moins la championne à battre…
