Tennis. Roland-Garros - Amélie Mauresmo, son bilan : "Tout n'a pas été parfait, mais..."
Dimanche, à 11h30, Amélie Mauresmo, directrice de Roland-Garros, a tenu une conférence de presse afin de dresser le bilan de cette édition 2025 de Roland-Garros. L'occasion de dévoiler les chiffres de ces trois semaines de compétition, en y incluant les qualifications toujours plus attractives, mais aussi d'évoquer certaines polémiques, notamment les matchs féminins quotidiennement programmés le matin sur le Central, souvent dans un stade qui sonne creux, les juges de ligne, mais aussi des sujets plus positifs comme la révélation Loïs Boisson ou des spectateurs toujours plus nombreux dans les allées de Roland-Garros.
Vidéo - Amélie Mauresmo a dressé le bilan de ce Roland-Garros 2025
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"Je suis une directrice heureuse"
"Quand j'ai pris mes fonctions en 2022, c'était avec cette envie et ces objectifs que l'on avait tous d'amener le tournoi dans de la modernité, tout en gardant nos bases de tradition, notre ADN forte et de l'histoire du tournoi, et également de tout mettre en place pour avoir le maximum d'émotions, pour que chaque personne qui vienne ici ait le maximum d'émotions. De ce point de vue, si on regarde cette édition 2025 de Roland-Garros, je crois qu’on a une grande satisfaction.
Je suis une directrice heureuse aujourd'hui devant vous par rapport à tout ce qui s'est passé, avec cette dernière journée qui est devant nous et qui sera magnifique, on l’espère tous. En commençant, au-delà de l'Opening Week, les émotions très fortes ressenties pour l'hommage à Rafa. On a commencé le tournoi de la meilleure des façons possible en rendant hommage au joueur qui a une histoire toute particulière avec le tournoi de Roland-Garros et ses 14 victoires. On a lancé dans l'émotion cette édition 2025. C'était l'objectif de lui rendre hommage de façon juste et légitime et en respectant l'homme qu'il est, surtout au-delà du champion que nous connaissons tous.
"Loïs Boisson, une belle surprise pour le tennis français"
On a eu aussi côté sportif deux tableaux très relevés. On voit bien l'homogénéité côté masculin et côté féminin pour nous proposer, surtout en cette fin de tournoi, des matchs de qualité, des matchs de dingue. Hier, une finale femmes très accrochée, on l'espère aujourd'hui une finale hommes qui va tenir ses promesses. On a eu côté français une belle histoire avec Loïs qui a eu un parcours incroyable, magnifique. Une belle surprise pour le tennis français. On voit cette appétence des Français, des spectateurs, des téléspectateurs qui ont envie de voir leurs champions, leurs championnes, aller loin dans le tournoi. Cela a été très important et cela a contribué au rayonnement aussi, en France notamment, de ce Roland-Garros 2025.
"La Concorde ? Cela a été un gros succès"
On a aussi pour objectif, depuis plusieurs années maintenant, de rendre le tournoi plus accessible. Pour cela, on a mis en place l'Opening Week qui nous amène aussi aujourd’hui à battre encore un record de fréquentation du tournoi. En effet, 685 000 personnes sont venues dans le stade Roland-Garros tout au long de ces trois semaines. C'est le chiffre définitif, en incluant la journée d'aujourd'hui. On a aussi permis à des gens, vous l'avez vu, à la tribune Concorde dans Paris, gratuitement, de regarder le tennis ensemble, devant des écrans géants, de vivre Roland-Garros d'une autre façon, avec une ambiance de dingue.
Il y a aussi des très beaux moments de ce point de vue, malgré parfois une météo qui n'a pas été toujours facile. Le public a vraiment envie de partager des émotions, encore une fois autour de Roland-Garros. Cela a été un gros succès. On a eu plus de 25 000 personnes sur place. On imagine que l'on va finir à plus de 30 000 ce soir avec cette journée du dimanche. Les vainqueurs présentent leur trophée au public là-bas, sur place. Il y aura d'ailleurs Coco Gauff qui sera présente entre 14 heures 30 et 15 heures là-bas. On a vraiment envie de faire rayonner Roland-Garros, même hors de nos murs. C'était un joli succès.
"La programmation des demi-finales hommes ? On peut s'en féliciter"
On a aussi, je pense, su se remettre en question sur certains points que l'on avait évoqués l'année dernière, à ce moment même, en conférence de presse de fin de tournoi. Je pense notamment à la programmation des demi-finales hommes. Je vous avais dit « oui, effectivement, tout n'est pas parfait, on va trouver des solutions ». On avait eu un remplissage clairement pas satisfaisant. Ce que l'on a mis en place cette année avec ces deux créneaux bien distincts et plus éloignés l'un de l'autre, cela a fonctionné. On a eu dans les moments clés, que ce soit sur cette demi-finale hommes, cette deuxième demi-finale hommes, ou à des moments, je pense à l'entrée des joueuses sur le court, etc. On a pris des mesures qui ont fonctionné, je pense que l'on peut s'en féliciter.
On sait que tout n'est pas parfait et que l’on doit bosser sur d'autres moments de la journée, sur d'autres choses. On continue les réflexions de ce point de vue. En tout cas, pour cela, cela a fonctionné. La mise en avant du tennis-fauteuil sur le Lenglen aussi, hier avec des tribunes quasiment pleines, très bien remplies en tout cas. C'est aussi un point positif pour nous tous. On a des belles audiences télé aussi sur la journée des demies femmes, avec plus de 13 millions, plus de 6 millions sur le match de Loïs. Vous avez tous les chiffres, je ne vais pas vous refaire tout ça. En tout cas, belle édition. Je vais attendre vos questions, parce que c'étaient les points que je voulais mettre en avant ce matin avec vous."
"Qu'est-ce qui pourrait faire qu'il n'y ait pas de juge de ligne l'année prochaine ?"
Tu parlais tout à l'heure d’un mix entre tradition et modernité. Quelles conditions devront être réunies pour qu'il y ait un jour des night sessions sur le Lenglen, ce qui pourrait aussi permettre de retirer certaines polémiques qui reviennent chaque année ? En termes de traditions, on pouvait s'interroger sur le niveau qu’auraient cette année éventuellement les juges de ligne qui manquent d'entraînement depuis le début d'année. J'ai l'impression que cela s'est très bien passé. Y a-t-il une raison pour laquelle ils ne pourraient plus être là l'an prochain ?
Par rapport à la session de soirée Suzanne-Lenglen, après chaque édition, on se repose les questions. On va le refaire en termes de programmation des matchs. On a notre séminaire de fin de tournoi qui arrive très vite après l'édition, parce qu'on veut vraiment être à chaud et avoir tout de suite les bonnes questions. On se reposera cette question-là. Cela avait été plutôt écarté en termes de capacité du stade. En tout cas, ce sont des questions qui reviennent chaque année.
On essaie aussi de voir par rapport à la consommation du public et des spectateurs qui viennent dans le stade ce que l'on pourrait faire évoluer, changer, etc. Dans deux semaines, on a notre séminaire et on va se reposer ces questions. Quand on en avait parlé les premières fois, c'était la capacité du stade, le flux dans le stade qui posait problème. Est-ce que l’on peut organiser autrement ? On se reposera la question. C'était quoi ta deuxième question ?
Les juges de ligne.
C'est vrai, ça s'est très bien passé, je touche du bois, parce qu’il reste une journée de jeu, donc on fera le point définitif à la fin de cette journée, à la fin du tournoi. Globalement, on a eu un très bon niveau, effectivement, et ça, c'est quand même une très grosse satisfaction pour nous. Parce que tu l'as dit, on est un peu les derniers des Mohicans avec les juges de ligne. On refera le point sur ce sujet-là. On s'était déjà posé la question l'année dernière, on se la reposera évidemment cette année avec l'ouverture nécessaire, les plus et les moins, etc. Qu'est-ce qui pourrait faire qu'il n'y ait pas de juge de ligne l'année prochaine ? Je n'ai pas vraiment la réponse là. En tout cas, on va se poser des questions.
L'idée, l'année dernière quand on a en avait parlé, c'était de se dire que l'arbitrage électronique sur terre battue, on n'en avait pas vu, pour l'instant. On a eu les expériences des tournois qui ont précédé, qui étaient assez fluctuants, avec des choses pas forcément très cohérentes ou en termes de fiabilité, on ne pouvait pas dire que c'était d'une grande fiabilité. Donc, on a gardé ce choix d'avoir les juges de ligne. Ce sera une discussion qu'on aura ensemble avec Gilles et toutes les équipes pour voir vers quoi on a envie d'évoluer l'année prochaine ou pas. La question reste ouverte.
Amélie, pour revenir aux programmations du soir, je sais que tu as dit par le passé que le contrat avec Prime vidéo signifiait que tu étais un peu limitée pour mettre des matchs en trois sets le soir. Cette semaine, je crois qu'ils ont demandé au moins le match de Loïs Boisson le soir. Est-ce que vous avez refusé cette demande, vous ou le tournoi, pouvez-vous nous le confirmer et commenter là-dessus ?
Je ne ferai jamais de commentaires sur les demandes, les requêtes de la télévision, des joueurs que nous recevons. Je ne répondrai pas à cette question.
"À partir du moment où la communication s'engage, je suis plutôt confiante"
Il y a eu beaucoup de discussions récemment, des Top 10 mondiaux autour de la répartition des sommes gagnées dans les Grands Chelems. En tant qu’ancienne joueuse, es-tu sensible à ces revendications ? Est-ce un point de préoccupation pour toi pour l'avenir ? Quelle est ta position là-dessus ?
Déjà, je suis très contente que la communication ait été engagée, et la communication plutôt en direct, c'est l'ancienne joueuse, effectivement, qui parle, sans intermédiaire, qui pourrait avoir des intérêts différents ou divergents, éventuellement, des joueurs et des joueuses. Je pense qu'à partir du moment où la communication s'engage, je suis plutôt confiante sur le fait que les choses vont évoluer dans le bon sens pour tout le monde, en fait. Je pense qu'à partir du moment où les vrais chiffres vont être communiqués, cela va aller dans le bon sens, tout simplement. Le but, en tout cas, c'est que ça aille ce sens-là, quelque chose de positif pour tout le monde.
Une question un peu décalée, parce que ça va intéresser les médias dans les jours à venir : Loïs Boisson va découvrir le gazon. Est-ce qu’on peut briller sur le gazon sans n’avoir jamais foulé cette surface ?
Elle n’a jamais joué sur herbe ?
Jamais. Et je fais appel à tes souvenirs de découverte de cette surface.
C'est beaucoup trop loin ! C'est possible, bien sûr. Bien sûr que c'est possible. Après, c'est vrai, historiquement et pour beaucoup de joueurs et joueuses, c'est une surface qui demande un peu d'expérience ; ça, c'est clair. Donc, on va voir. L'herbe a aussi évolué depuis plusieurs années maintenant. De nombreuses années, ça s'est ralenti, il y a des spécificités par rapport à la hauteur du rebond. Globalement tu peux faire des échanges sur herbe. Je pense que ça va plutôt aller dans son sens. Après, c'est la joie de la découverte aussi ! C'est comme ça. Il faut garder l'esprit ouvert. Ce n'est pas « je remets tout à zéro », parce que ce n'est pas du tout ça, mais c’est « je fais les ajustements », et l'idée est de les faire le plus rapidement possible pour que le jeu produit puisse s'adapter à cette surface. Les adaptations aujourd'hui par rapport à il y a 20 ans, ou même plus, c'est moins le grand écart.
"Tout n'a pas été parfait pendant ce tournoi, et on en est conscient"
Une autre question sur la programmation. Quand on regarde la foule, et au début du match, entre Gauff et Sabalenka et Gauff et Swiatek, et le début du match entre Zheng et Sabalenka, et Gauff et Keys, c'étaient les premiers matchs du jour sur le Chatrier. Il y avait beaucoup de sièges vides. Comment pouvez-vous améliorer cette atmosphère à l'avenir ? Parce qu'il y a vraiment un désavantage pour les femmes de démarrer avec des stades quasiment vides.
Comme je l'ai dit, tout n'a pas été parfait pendant ce tournoi, et on en est conscient. On va bien entendu travailler sur des solutions pour l'avenir. Mais il n'y a pas grand-chose d'autre. Comme je l'ai dit en français, nous aurons dans deux semaines, un débrief, tous ensemble, et nous allons bien entendu aborder ces sujets pour voir comment nous pouvons faire fonctionner les choses beaucoup mieux.
Sinner-Alcaraz : est-ce que tu crois qu'on assiste à la naissance d'une nouvelle ère et à une nouvelle rivalité comme on a pu connaître autrefois avec Borg/McEnroe ou des Federer/Nadal, Nadal/Djokovic ou autres ?
Je pense que c'est possible, oui. L'avenir, forcément, nous le dira. En tout cas, ces deux-là qui se retrouvent en finale aujourd'hui, ce n'est pas un hasard, évidemment. D'abord, par leur classement, ils dominent pour l'instant le tennis mondial. Et, effectivement, vu leur âge on peut imaginer qu'ils vont encore continuer à progresser, à évoluer et à faire évoluer le jeu, parce que je trouve qu’ils font évoluer le tennis masculin. On se demandait comment ça allait être possible après l'aire du Big 4 ou Big 3, et aujourd'hui ils sont là-dedans. Donc, oui, on peut imaginer que ce sont des joueurs qui vont être là pour un long moment, qui ont un niveau extrêmement élevé au vu de leur âge, déjà un palmarès aussi incroyable à leur âge, et forcément, on s'imagine qu'ils vont être là pendant un moment avec cette rivalité sous-jacente qui va animer le circuit. On peut l'imaginer, oui.
"Le mode de consommation des gens a évolué ces dernières années"
Un point de précision. Vous disiez à un moment que vous travailliez sur les autres moments de la journée que la night session. Est-ce que vous pouvez un peu détailler ? Est-ce que c'est les premiers matchs de 11 heures ?
Oui, par rapport au remplissage sur lequel on continue de réfléchir et travailler. Ce n’est pas simple. Le mode de consommation des gens a quand même évolué sur des dernières années. On voit bien qu'ils ne restent pas 6, 7, 8 heures : ils choisissent. Dans le stade il y a beaucoup de choses aussi. Ils ont d'autres choses à voir, à faire et à expérimenter, d'une certaine façon. C'est un peu le pendant de ce qu'on propose en dehors. C’est essayer de trouver l'équilibre.
Amélie, une question un peu semblable. Vous avez passé tout le tournoi. Vous avez regardé ce qui se passait. Il y a eu des moments remarquables, en plus ou en moins, si on peut dire. Si vous deviez noter un point fort qui vous a vraiment marquée au cours de ces deux semaines, je sais que vous aviez dit qu'il y aurait un débrief peu de temps après, est-ce qu’il y a quelque chose que vous avez à l'esprit, tout de suite là que vous aimeriez changer ?
Pour la première question, c'est difficile à dire, parce que beaucoup de choses se sont passées pendant les trois dernières semaines. Si on veut s'écarter du sport, c'est un peu du sport aussi, mais c'est un moment plus historique, je dirais que c'est Rafa sur le court Chatrier, le court central, qui absorbait tout cet amour, qui recevait tout cet amour de la foule, de l'organisation et des autres grands joueurs de son époque et son côté touchant à ce moment-là, je crois que ce sont des images, le stade, les couleurs, l'harmonie dans tout cela, c'est probablement ce qui ressort et qui me paraît important. Quant aux choses à traiter, nous avons déjà parlé du remplissage, et nous allons retravailler le remplissage, la programmation, les horaires, et ces sujets, qui sont toujours difficiles, toujours un problème, dépendent de beaucoup d'éléments.