Tennis. Roland-Garros - Aryna Sabalenka : "Notre relation s'est améliorée avec Iga Swiatek"
Aryna Sabalenka a tenu sa revanche, face à Qinwen Zheng. Dominée par la Chinoise lors du WTA 1000 de Rome quelques jours avant Roland-Garros, la Biélorusse a rapidement remis les pendules à l'heure, en quarts de finale du Grand Chelem parisien (7-6(3), 6-3). Menée 4-2 dans la première manche et malmenée dans la deuxième, la n°1 mondiale a été décisive dans les moments importants, comme souvent. Pour la deuxième fois de sa carrière après 2023 et un match d'anthologie contre Karolina Muchova, elle disputera une demi-finale dans la capitale. Elle y défiera la reine de Paris Iga Swiatek.
Vidéo - Aryna Sabalenka, qualifiée pour les demi-finales
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"On mérite d'être traitées à égalité avec les hommes"
C'était ton 10e quart de finale en Grand Chelem consécutif.
Ce sont des statistiques fortes. Je n'y pensais pas aujourd'hui, j'étais concentrée sur mon jeu. C'est incroyable. Ces statistiques sont incroyables.
Félicitations pour aujourd'hui ! Y a-t-il eu une déception par rapport au public ? Parce que tu es n°1, tu es championne, tenante de plusieurs titres et pourtant, il y avait des personnes qui partaient pour déjeuner. Quel sentiment as-tu eu face aux sièges qui se sont vidés aux abords et en haut ?
Je n'ai pas tellement regardé le public mais, moi, j'avais le sentiment qu'il y avait beaucoup de monde. Je suis d'accord, c'est un gros match, peut-être que cela aurait été plus logique de le programmer plus tard, pour que plus de public puisse y assister. En même temps, je suis ravie de finir plus tôt, parce que j'ai une demi-journée de libre devant moi, je peux profiter de la ville et puis j'ai beaucoup de choses à faire également. A ce sujet, je pense effectivement que ce serait plus logique de le programmer à un créneau plus tardif.
Pour rebondir là-dessus, je comprends pourquoi tu préfères avoir le reste de la journée libre et en avoir fini avec ton match, mais concernant le tournoi féminin, est-ce que tu as le sentiment que les femmes reçoivent un traitement égalitaire face aux hommes en matière de programmation ? Elles n'ont pas joué un seul match en session de nuit.
Oui, je suis d'accord. Je dois dire que nous méritons d'être traitées à égalité. Il y a eu beaucoup de bataille, beaucoup de matches de qualité qui méritent d'être vus en session de nuit pour qu'il y ait plus de public qui y assiste, pour pouvoir assister à ces batailles incroyables. Cela mérite donc plus de gens. Nous méritons d'être mises en lumière davantage, avec une meilleure programmation en termes de timing, et plus de public qui assiste au match.
"Notre relation s'est améliorée avec Iga Swiatek, on s'entend mieux"
Tu vas affronter Iga (Swiatek) au prochain tour. Peux-tu parler de ta relation avec elle, comment cela a évolué ? Les rivalités qui vous opposent, est-ce que cela a évolué ? Y a t-il une meilleure compréhension entre vous deux de ce que cela signifie que d'être une athlète de top niveau ?
Avant, il n'y avait pas d'entraînement, pas de communication mais maintenant ça s'est amélioré, on s'entend mieux. On s'entraîne plus souvent ensemble. On se connaît plutôt bien. Il y a eu de grandes batailles dans le passé l'une contre l'autre. Si je dois affronter Iga, ça me réjouit fortement parce que ce sera un grand match et je me réjouis d'avance d'aller sur le court et de l'affronter, le cas échéant.
Je voulais te poser une question sur le fait d'affronter une joueuse plus puissante que toi. Est-ce que dans ces cas-là, tu irais plus en arrière et qu'est-ce que c'est la puissance ? Est-ce que la puissance te menace ? Est-ce que tu voudrais jouer contre une joueuse qui est plus puissante que toi, qui a plus de force ?
D'abord, je ne pense pas avoir affronté une joueuse qui a plus de force que moi, qui soit plus une cogneuse que moi, mais franchement je m'en moque si quelqu'un va essayer de frapper plus fort que moi en face de moi ou changer de rythme et me faire bouger sur le court. Au fur et à mesure, j'ai beaucoup affiné mon jeu. Je pense que je suis prête à affronter des joueuses qui sont des cogneuses, mais aussi qui vont me faire bouger, courir sur le terrain pour gagner chaque point. Je suis à un stade de ma carrière où peu m'importe. Maintenant, quand il s'agit de puissance, j'aime bien parce que je me dis : Ok, tu veux que je te montre un petit peu ce que c'est que la puissance ? Attends, je vais te montrer ce que j'ai en réserve. J'aime bien ce moment-là parce que je me dis : on va voir qui gagne, qui va prendre le dessus.
"On me disait que mes émotions ne m'aidaient pas, mais qu'elles me détruisaient"
Concernant Iga, tu as dit que ta relation s'est améliorée avec elle au fur et à mesure des années que vous avez commencé à vous entraîner. Est-ce qu'il y a eu un fait déclencheur qui a modifié votre relation pour que vous soyez devenues plus proches ?
Non, je suis juste allée la voir et je lui ai demandé de faire un Tik Tok à Ryad en finale. Je me suis rendu compte qu'on pouvait communiquer, peut-être échanger, peut-être s'entraîner ensemble. La première étape, je dirais, ça a été ce moment-là. J'ai fait un Tik Tok avec elle à Ryad l'année dernière, on a fait une petite danse ensemble et depuis lors, je pense que notre relation s'est améliorée.
Pour rebondir sur ce point, est-ce que tu aimes affronter des championnes ? Je sais que tu aimes être n° 1, mais est-ce que tu aimes aussi affronter les meilleures des meilleures, si c'est le cas bien sûr, parce qu'on est en Grand Chelem ?
J'adore. J'adore les défis quand ils sont de taille. Ce sont les matchs où on s'améliore en tant que joueuse, c'est là où on devient plus forte et donc j'adore les défis. Je suis toujours ravie d'affronter quelqu'un qui est fort, quelqu'un qui peut me mettre au défi parce que c'est comme cela que je le vois, je le perçois comme un défi à relever. A ce moment-là, je peux lâcher tous mes coups pour essayer de remporter la victoire.
À l'heure actuelle, tu sembles être à l'aise, satisfaite de toi, mentalement. Tu sembles aussi être complète dans ton jeu. Je me suis demandé, qu'est-ce qui est arrivé en premier dans ton esprit : est-ce que c'est d'abord l'état d'esprit qui a changé pour que ton jeu s'améliore ou est-ce que c'est d'abord ton jeu qui s'est amélioré pour qu'ensuite mentalement tu sois plus à l'aise avec toi-même ?
C'est une bonne question. Tout vient ensemble. Tout est combiné. Quand j'ai commencé à contrôler mes émotions, quand j'ai compris comment je fonctionnais, un petit peu mieux, je pense que ça a été le moment où j'étais en mesure de m'ouvrir à d'autres choses. C'est bien de la partie mentale que tout est parti.
Il y avait beaucoup de problèmes dans les matchs à cause de mes émotions. Je me suis dit : peu importe ce qui se passe sur les courts, je ne vais pas être épuisée par mes émotions, je ne vais pas être complètement forte sur le court, je vais jouer les points. Je vais simplement vivre au jour le jour, dans le moment présent et c'est là que j'ai gagné l'Open d'Australie et je me suis dit : j'aurais dû faire ça plus tôt. Tout le monde me le disait auparavant et on me disait que mes émotions ne m'aidaient pas, au contraire elles me détruisaient. Je disais « ouais, ouais »… Je me suis rendu compte que quand il y avait des matchs serrés, je me suis dit : c'est le moment de changer les choses. J'étais ravie d'y être parvenue.
"Serena Williams ? Elle n'était pas plus puissante que moi"
J'ai eu le sentiment que tu utilisais un slice en coup droit de façon très appropriée, en défense, pas seulement aujourd'hui mais pendant la saison sur terre battue. J'ai eu l'impression que c'était un coup particulièrement efficace. Est-ce que c'est quelque chose que tu as rajouté à ta panoplie ? Comment décides-tu de choisir tel ou tel coup, un coup slicé par exemple ou un coup droit puissant ?
Je travaille dessus depuis 2 ans, sur mon toucher, sur le coup droit, mon revers, sur les coups slicés, sur les amorties. Je ne sais pas comment je prends la décision, je fais confiance à mon instinct. Quand je me dis : la balle va trop loin de moi, je ne peux pas l'attraper, alors je vais essayer un slice. Et si j'ai confiance dans un coup et je vois qu'il faut changer un peu de rythme face à l'adversaire pour tirer davantage plutôt que de surjouer et de surfrapper, alors quand je vois que je ne suis pas en bonne position, que je ne suis pas bien sur mes appuis, je prends un coup slicé à ce moment-là. Je choisis en fonction de la situation parce que je sens que je dois le faire.
Félicitations. Qu’as-tu pensé de la performance de Qinwen ? Est-ce qu'elle été aussi bonne que toi ? Est-ce que tu penses qu'elle sera aussi bonne que toi ?
C'est une excellente joueuse. Et je pense qu'elle va disputer des matchs de très grande qualité. J'ai beaucoup apprécié la bataille que nous avons livrée aujourd'hui, notamment au premier set, le premier set était très serré. Et, le match aurait pu prendre n'importe quelle direction. Je suis donc ravie d'avoir pu remporter la victoire en deux sets. Elle joue un tennis formidable.
Félicitations. Ce que tu as dit en matière de puissance, il y a quelques minutes : "Si j'ai une adversaire puissante, je me dis, allez, on va voir comment cela va arriver !". Cela me rappelle Serena Williams en 2021. C'est ce qu'elle a dit à ton sujet. Elle a dit :"Ah, tu veux être puissante ? Tu veux cogner ? Allons-y !". Toi, tu as dit que tu n'avais jamais affronté une joueuse aussi puissante qu'elle.
Je pense qu'elle n'était pas plus puissante que moi pendant ce match. Mais, physiquement, elle était certainement meilleure. Elle a réussi à mettre plus de balles de mon côté que le contraire. Je n'ai pas le sentiment qu'elle m'ait surpassée en termes de puissance à ce moment-là.
"Si Bublik jouait comme contre Draper à chaque fois, il serait Top 10"
Pour parler encore de force, de puissance, toi, tu es une joueuse complète, tu peux tout faire ! Sinon, tu ne serais pas numéro 1 mondiale. Mais comment peux-tu expliquer le fait qu'hier, Bublik a joué 36 amorties gagnantes contre Draper, dans un seul match ?
Quand on voit le tennis féminin, on ne voit pas autant d'amorties. Même Paolini, que tu connais très bien, elle essaie de décocher des coups forts comme toi, mais elle parvient peut-être à 3 amorties en un seul match. Toi, je ne sais pas quelle est ta moyenne d'amorties par match. Comment expliques-tu cela ? Ne penses-tu pas que Bublik, s'il a été en mesure de décocher 36 amorties, gagnantes pour la plupart, contre un joueur très fort, Jack Draper, pourquoi les femmes ne font pas de même, ou pas aussi souvent, ou pas autant ?
Bonne question ! Les amorties, c'est un coup risqué. Il faut avoir un bon toucher, une bonne compréhension du court pour être en mesure d'y parvenir. Toutes les femmes ne sont pas sans crainte, comme Bublik, je dois dire. Moi, je me suis dit que c'était son jour, hier. Je ne sais pas s'il décoche autant d'amorties à chaque match, ni s'il jouerait comme ça contre Jack Draper à chaque fois. Si c'était le cas, il serait dans le top 10 !
Je pense qu’il y est allé et il a décidé de les lâcher. C'est incroyable. Moi, j’aurais aimé voir un cinquième set. Au premier set, je soutenais Draper, parce que Bublik faisait des choses incroyables. A chaque fois qu'il prenait une décision de décocher un certain coup, il y parvenait. Les amorties déjà, au retour, ça n'avait aucun sens ! Ce sont des coups assez risqués. Si vous avez le sentiment que c'est le jour où tout va rentrer, alors il faut y aller. C'est un bon coup, surtout sur terre battue, parce qu'on a plus de temps. Et si vous êtes assez puissant, on peut construire les points, et faire deviner à son adversaire exactement le genre de coup qu'on va faire. Mais c'est un coup risqué, tout le monde n'a pas un aussi bon toucher que Bublik l'a eu hier. Mais aujourd'hui, les femmes essaient de varier leurs coups, de varier leur rythme. Nous nous améliorons dans ce compartiment du jeu.
"Là où je me sens le plus à l'aise, c'est en jouant avec ma force et ma puissance"
Une question sur un sujet similaire. Toi, tu as eu recours aux amorties aujourd'hui. Tu en as utilisé 10 aujourd'hui.
Tu as vu, hein ?!
Elles semblent être une arme très efficace. Est-ce quelque chose sur lequel tu t'es entraînée de manière intentionnelle ces dernières années ? Parce que tu fais beaucoup de mal avec tes amorties !
On a travaillé là-dessus depuis quelques années, pour ce coup spécifique. Effectivement, j'en retire beaucoup de bienfaits. Mais je ne vais pas décocher des amorties à chaque match, comme Bublik l'a fait hier. Si j'ai le sentiment que ça va fonctionner, je vais le faire. Mais je vais jouer avec ma force, avec ma puissance, parce que c'est là où je me sens le plus à l'aise. Mais j’essaie de faire reculer les joueuses derrière la ligne de fond pour rendre la lecture de mon jeu plus difficile, afin qu'elles devinent plus difficilement ce que je vais faire. Et ça, je pense que cela apporte beaucoup d'avantages.