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Tennis. INTERVIEW - Bernard Giudicelli : "On a vu Gerard Piqué comme une bouée de secours"

Par Alexandre HERCHEUX le 17/11/2025 à 10:16. Mis à jour le 20/11/2025 à 14:08.
INTERVIEW
Photo : @TennisActu / Getty Images for ITF

"La Coupe Davis n’est pas morte : elle est sauvée !" Bernard Giudicelli l'assume et l'assure. Président de la Fédération Française de Tennis entre 2017 et 2021, le Corse, également ancien vice-président et membre du board de l'ITF (Fédération Internationale de Tennis), avait subi de lourdes critiques en France, notamment lors de la demi-finale de Coupe Davis 2018 contre l'Espagne. Vu comme un des fossoyeurs de la Coupe Davis ancien formatl'ex-président de la FFT avait été tancé par le public français mais aussi par Nicolas MahutJo-Wilfried Tsonga, Pierre-Hugues Herbert et Yannick Noah, pour ne citer qu'eux. Sept ans plus tard, Bernard Giudicelli est revenu sur cet épisode dans un entretien accordé à Tennis Actu. L'ancien patron de la FFT a évoqué librement les critiques à son encontre, les polémiques, sa position lors des discussions à l'ITF, sa relation avec Gerard Piqué, ou encore le format actuel de la Coupe Davis. ENTRETIEN. "Quand on est élu à l’ITF, on agit pour l’intérêt mondial, pas pour sa nation d’origine. On ne pouvait pas être égoïstes..."

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"Je ne dirais pas que j'avais raison, mais... "

Bonjour Bernard Giudicelli, merci de nous accorder ce petit entretien. Comment allez-vous ? On ne vous entendait plus trop : vous étiez très discret sur les réseaux, alors qu’auparavant vous étiez plutôt prolixe.

Bernard Giudicelli — Disons que… je vais mieux. J’ai traversé deux années difficiles : on m’a diagnostiqué un cancer du sang (un lymphome) fin décembre 2024, à mon retour de Malaga pour les Finales de Coupe Davis, et il a rechuté en janvier. Je bénéficie d’un nouveau traitement et, pour l’instant, je suis en rémission. Le tennis est donc passé au second plan… Mais oui, je m’y intéresse toujours : c’est ma passion, simplement de façon plus sélective. 

 

On souhaitait vous parler parce que la Coupe Davis arrive à nouveau en phase finale. On l’a souvent dite « morte » : qu’en pensez-vous ? 

Bernard Giudicelli — Elle n’est pas morte : elle est sauvée. Et, honnêtement, au départ je n’y croyais pas moi-même. J’ai été élu au Board de l’ITF en septembre 2015, puis en décembre président du Comité de la Coupe Davis — une première pour un Français. En 2016, j’ai proposé une Coupe Davis sur deux ans pour lui redonner de la valeur. Très vite, les financiers de l’ITF nous ont rappelé la réalité : la Coupe Davis représentait environ 74 % des recettes de l’ITF ; on ne pouvait pas « se couper une jambe ». En décembre 2016 à Barcelone, le Board a étudié un projet porté par Gerard Piqué/Kosmos. J’étais prêt à démissionner ; des collègues m’ont demandé d’attendre. Le Board a donné un avis favorable et c’est parti — avec les vicissitudes que l’on connaît. 

 

Kosmos : histoire compliquée, fin de la coopération et reprise en main par l’ITF. Était-ce une erreur de casting ? 

Bernard Giudicelli — Non. En 2017, les audiences étaient catastrophiques ; la chute avait commencé dès 2007 — l’arrivée de l’iPhone a changé la consommation digitale. La Coupe Davis devenait confidentielle au niveau mondial, n’intéressant vraiment que les deux pays hôtes. Le sponsor-titre de l’époque (BNP) exigeait contractuellement la présence de joueurs du Top — impossible à garantir avec des indépendants. Nous avons vu en Kosmos une bouée de secours pour éviter le naufrage financier. L’ITF est demeurée propriétaire de l’épreuve ; la gestion a été déléguée avec des garde-fous. Le deal n’a pas abouti pour des raisons couvertes par le secret des affaires ; l’ITF a repris la main et l’épreuve a retrouvé de la santé, ce que montre la participation des meilleurs. Le produit n’est pas encore « fini » : il faut continuer à le travailler. 

 

"Ils n’ont rien compris. La Coupe Davis n’a pas une « âme », elle a une identité"

Et Gerard Piqué personnellement ? L’image du footballeur qui débarque dans le tennis a choqué.

Bernard Giudicelli — C’est un homme d’affaires qui a réussi, passionné de sport et de Coupe Davis. Il s’est entouré de gens connaissant le tennis professionnel. Dans mes échanges, il a toujours été respectueux des décisions du Board, du Conseil et du Comité de la Coupe Davis. Je n’ai pas d’image négative de lui — même si les opposants au projet s’en sont donnés à cœur joie. 

 

Vos détracteurs disent que vous avez « vendu l’âme » de la Coupe Davis. Avec le recul ? 

Bernard Giudicelli — Ils n’ont rien compris. La Coupe Davis n’a pas une « âme », elle a une identité : un trophée qui récompense la meilleure nation du monde — c’est écrit dès l’origine (défi lancé aux Anglais au début du XXᵉ siècle). Elle a évolué à plusieurs reprises, notamment vers le professionnalisme et la création du Groupe Mondial en 1991. Quand on est élu à l’ITF, on agit pour l’intérêt mondial, pas pour sa nation d’origine. En 2018, l’Assemblée générale de l’ITF à Orlando a adopté la réforme à 74 % : rien n’a été vendu. En France, l’attachement à certaines ambiances (comme Lille 2017) est fort, mais on ne pouvait pas être égoïstes. 

 

 

"Aucun regret : je savais que l’histoire me donnerait raison"

Nicolas Mahut a été très critique ; vous lui avez répondu sèchement, parlant de retraite… Des regrets sur la forme ? 

Bernard Giudicelli — J’assume. Une anecdote : après la finale France–Belgique à Lille, le président de la fédération belge m’apprend que David Goffin, avec ses deux points, a gagné… 40 000 €. Les Français à domicile, eux, gagnaient beaucoup plus. L’ancien format reposait à 90 % sur la billetterie : l’équipe qui reçoit garde la totalité des bénéfices (recettes – dépenses) pour les joueurs et le capitaine ; la fédération ne touchait rien. Pour certains pays, c’était l’unique revenu ; pour d’autres, une rente. Les comparaisons avec la Ryder Cup étaient hors-sujet. Aucun regret : je savais que l’histoire me donnerait raison. 

 

Les joueurs voulaient-ils vraiment changer ? 

Bernard Giudicelli — Oui. À l’US Open 2016, le conseil des joueurs disait : « On ne veut plus du meilleur des cinq, étalé. On veut une semaine, avec toutes les nations présentes. » Ce sont les joueurs qui ont mis la réforme sur les rails. J’ai échangé avec certains (notamment des Français au conseil) pour qu’ils portent ces idées. 

 

"2018 à Lille, sur le moment, c’était douloureux. Aujourd’hui, c’est digéré..."

France–Espagne en 2018 à Lille : supporters français habillés en noir, contestation… Avec le recul ? 

Bernard Giudicelli — Sur le moment, c’était douloureux. Aujourd’hui, c’est digéré. Il fallait accepter que c’est une épreuve mondiale, essentielle au financement du tennis. Pour illustrer : la subvention du CIO à l’ITF pour quatre ans est à peu près équivalente à ce que la FFT verse chaque année à ses Ligues et Comités. À Bercy en 2020, Rafael Nadal m’a dit : « Les Grands Chelems sont égoïstes. » Former un joueur jusqu’au Top 100 coûte très cher. Nous avions lancé le Trophée Chatrier qui récompensait les fédérations selon leurs résultats juniors : des pays comme la Pologne ont perçu 100 000 € (de quoi financer un coach la saison suivante). Cette politique a ensuite été arrêtée en France. Le problème mondial, c’est le renouvellement des joueurs dans les nations moins dotées : il s’érode. 

 

Le Final 8 à Bologne : bonne formule ? 

Bernard Giudicelli — Il y a des progrès : le retour d’une semaine à domicile en septembre recrée du lien. Mais on a perdu une semaine de calendrier (on est passé de quatre à trois) ; or une semaine de tennis mondial vaut très cher. Idéalement, récupérer une 4ᵉ semaine et finir en Final 4 éviterait certaines programmations. Un retour au aller-retour intégral ? Enterré. 

 

"Paradoxalement, je pense que cette finale de 2017 a fait du mal à la Coupe Davis"

Avec le recul, votre mandat ? 

Bernard Giudicelli — À la FFT, mon mandat était de moderniser la gouvernance : devoir accompli. À l’ITF, j’avais un mandat international, pas français. J’ai conservé beaucoup d’amis dans le monde du tennis ; récemment, un dirigeant sud-américain m’a dit : « Un jour, on reconnaîtra tout le bien que tu as fait à cette compétition. » 

 

France–Belgique à Bologne : vous y serez ? On n’aura pas l’ambiance de Lille… 

Bernard Giudicelli — Non. J’ai encore la banderole blanche de Lille dans mon bureau — elle est immense. Paradoxalement, je pense que cette finale a fait du mal à la Coupe Davis : certains dirigeants internationaux se sont dit que les Français (déjà bénéficiaires de Roland-Garros) profitaient aussi de la Coupe Davis. Je suis immunodéprimé ; je dois éviter les foules. J’ai bien sûr été invité (je suis membre honoraire de la compétition à l’ITF), et Bologne est à deux pas, mais je n’irai pas ; je suivrai à distance. 

 

"Certains ont compris qu’il n’y avait pas d’alternative. D’autres aiment s’agiter sur les plateaux télé…"

Vous êtes-vous réconcilié avec certains joueurs/capitaines ? Vous citiez Yannick Noah… 

Bernard Giudicelli — Je n’ai pas besoin de me « réconcilier ». Il y a une vie après le tennis. J’ai de vrais copains parmi les joueurs — Jérémy Chardy, par exemple — et d’autres qui ont compris qu’il n’y avait pas d’alternative. D’autres aiment s’agiter sur les plateaux télé… C’est la vie. Sébastien Grosjean, avec qui j’ai souvent échangé (il connaît aussi le business), sait qu’il n’y avait pas d’autre voie. 

 

Jannik Sinner ne défendra pas le titre de l’Italie : un mot ? 

Bernard Giudicelli — C’est dommage pour l’Italie, mais il l’a déjà prouvé deux années de suite : l’Italie est la meilleure nation du monde par équipes. Ils restent armés : un numéro 2 solide et un bon double ; la Coupe Davis, ce sont des sprints, pas des marathons. 

 

La France peut-elle gagner ? 

Bernard Giudicelli — D’abord, il faut battre la Belgique. Ensuite, l’Italie. J’ai des réserves sur certains choix de sélection : quand on veut gagner, on envoie des signaux positifs dès le départ. À mon sens, certains joueurs qui ont qualifié l’équipe auraient dû être intégrés d’entrée. On verra. Ce sera compliqué, mais possible.



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